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24 novembre 2013 7 24 /11 /novembre /2013 05:56

 

 

 

Amarissimes

 

Est-ce moi qui pleurais ainsi

    — Ou des veaux qu’on empoigne —

D’écouter ton pas qui s’éloigne,

    Beauté, mon cher souci ?

 

Et (je t’en fis, à pneumatique,

    Part, — sans aucun bagou)

Ces pleurs, ma chère, avaient le goût

    De l’onde adriatique.

 

Oui, oui : mais vous parlez de cri,

    Quand je repris ma lettre.

Grands dieux !... J’aurais mieux fait, peut-être,

    D’écrire à son mari.

 

 

Paul-Jean TOULET  

Contrerimes, 20

 

 

 

drolling-homme-nu--.jpg

 

...Grands dieux !... J’aurais mieux fait, peut-être,

    D’écrire à son mari.

 

 

Martin Drölling (1752-1817).  Homme nu, assis et écrivant. 

Palais des Beaux-Arts de Lille.

 

 

 

    _  _  _

 

Musée d'Orsay, jusqu'au 2 janvier 2014 

Masculin / Masculin. L'homme nu dans l'art de 1800 à nos jours.

 

 

 

 

 

 

Pourquoi aucune exposition n'a-t-elle jamais été dédiée au nu masculin jusqu'à Nackte Männer au Leopold Museum de Vienne l'année dernière ? C'est pour répondre à cette question que l'exposition d'Orsay confronte des oeuvres, à travers les époques et les techniques, autour de grands thèmes qui ont forgé la représentation du corps masculin sur plus de deux siècles.

Il faut avant tout distinguer la nudité et le nu : un simple corps dépouillé de ses vêtements, qui suscite la gêne par absence de pudeur, diffère de la vision épanouie d'un corps remodelé et idéalisé par l'artiste. Si cette distinction peut être nuancée, elle met en exergue la valeur positive et décomplexée du nu dans l'art occidental depuis la période classique.

 

Pour notre époque, le nu évoque essentiellement un corps féminin, héritage d'un XIXe siècle l'érigeant en absolu et en objet d'un désir viril assumé. Auparavant pourtant, le corps féminin était moins valorisé que son homologue masculin, plus structuré et musculeux. Au moins depuis la Renaissance, le nu masculin avait bénéficié de la primauté : l'homme en temps qu'être universel se confondait dans l'Homme et son corps était érigé en norme du genre humain, comme c'était déjà le cas dans l'art gréco-romain. Le fond culturel judéo-chrétien occidental abonde dans ce sens : Adam préexiste à Eve qui n'est autre que sa copie à l'origine du péché.

Dans leur grande majorité, les artistes hommes trouvent dans le nu masculin un "moi idéal", miroir magnifié et narcissique d'eux-mêmes. Jusqu'au milieu du XXe siècle, l'organe sexuel fait pourtant l'objet d'une certaine pudeur, qu'il soit atrophié ou bien dissimulé sous quelque draperie, lanière ou fourreau d'épée subtilement placés.

 


David-Academie-d-homme-1778.gif

DAVID

Académie d'homme, 1778

actuellement au Musée d'Orsay

 

 

 


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19 octobre 2013 6 19 /10 /octobre /2013 04:38

 

 

 

 

Alcôve noire

 

Ces premiers froids que l’on réchauffe d’un sarment,

- Et des platanes d’or le long gémissement,

- Et l’alcôve au lit noir qui datait d’Henri IV,

Où ton corps, au hasard de l’ombre dévêtu,

S’illuminait parfois d’un rouge éclair de l’âtre,

Quand tu m’aiguillonnais de ton genou pointu,

Chevaucheuse d’amour si triste et si folâtre ;

- Et cet abyme où l’on tombait : t’en souviens-tu ?

 

 

 

Paul-Jean Toulet

Chansons

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

nu-willy-ronis-2.jpg

Ces premiers froids que l’on réchauffe d’un sarment,

 

 

Willy Ronis

 

 

©WillyRonis

 

Delphin-Enjolras-Nude-by-Firelight.jpg

S’illuminait parfois d’un rouge éclair de l’âtre,

Delphin ENJOLRAS

Nu à la lumière du feu de bois

 

Delphin Enjolras, né le 13 mai 1865 à Coucouron (Ardèche) et mort le 23 décembre 1945 à Toulouse, est un peintre aquarelliste académique français.

Il est connu pour ses scènes de jeunes filles dans l'intimité. Il a étudié l'aquarelle avec Gaston Gérard puis à "l’École de Dessin de la Ville de Paris" avec Jean-Léon Gérôme & Pascal Dagnan-Bouveret.



 

 

 

BONNARD-Nu-devant-la-cheminee.jpg


 

 

 

Pierre BONNARD


Nu devant la cheminée



 

 

 

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7 août 2013 3 07 /08 /août /2013 07:02

 

 

 

 

 

 

 

 

Les poètes, gens précieux

 

 

Les poètes, gens précieux

Et bons à tout, sauf à se taire,

Qui croient, d’un verbe audacieux,

Moissonner l’azur spacieux,

Leur poids les attache à la terre.

Mais les fils de Bellérophon

De la nue écartant les voiles,

On doute à cet éclair que font

Leurs ailes dans le ciel profond,

Si c’est pour cueillir des étoiles.

 

 

Paul-Jean Toulet

1867-1920

 

 

 

 

Dans la mythologie grecque, Bellérophon (en grec ancien Βελλεροφῶν / Bellerophỗn) est le fils de Glaucos (ou de Poséidon, suivant les versions), roi de Corinthe et d'Eurynomé (ou Eurymédé), une mortelle. C'est aussi le petit-fils de Sisyphe. Bellérophon est « le plus grand héros et tueur de monstres, aux côtés de Cadmos et de Persée, avant la venue d’Héraclès ». Son plus grand exploit est d'avoir abattu la Chimère.

 

 

 

Bellerophon-et-Pegase--1888.png

 

Bellerophon et Pegase, 1888

 

 

On retrouve Bellérophon chez La Fontaine dans la fable l'Ours et l'Amateur des Jardins (livre VIII) dont voici le début :

 

Certain Ours montagnard, Ours à demi léché,

Confiné par le sort dans un bois solitaire,

Nouveau Bellérophon vivait seul et caché :

Il fût devenu fou ; la raison d'ordinaire

N'habite pas longtemps chez les gens séquestrés :

Il est bon de parler, et meilleur de se taire,

Mais tous deux sont mauvais alors qu'ils sont outrés.

Nul animal n'avait affaire

Dans les lieux que l'Ours habitait ;

Si bien que tout Ours qu'il était

Il vint à s'ennuyer de cette triste vie.

Pendant qu'il se livrait à la mélancolie,

Non loin de là certain vieillard

S'ennuyait aussi de sa part.

(...)

 

 

 

 

 

 

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12 juin 2013 3 12 /06 /juin /2013 05:10

 

 

Dans Arles

 

 

Dans Arles, où sont les Alyscamps

Quand l'ombre est rouge, sous les roses,

Et clair le temps,

Prends garde à la douceur des choses,

Lorsque tu sens battre sans cause

Ton coeur trop lourd,

Et que se taisent les colombes:

Parle tout bas si c'est d'amour,

Au bord des tombes.

 

Paul Jean TOULET

 

 


 

Gauguin-Les-Alyscamps.jpg 

Paul Gauguin (1848-1903)

Les Alyscamps

1888

Huile sur toile

H. 91,5 ; L. 72,5 cm

Paris, musée d'Orsay

Don de la comtesse Vitali en souvenir de son frère le vicomte Guy de Cholet, 1923

© RMN-Grand Palais (Musée d'Orsay) / Hervé Lewandowski

 

 

 

 

Prends garde à la douceur des choses  est le titre d'un roman de Raphaële Billetdoux paru en 1976 et qui obtint le prix Renaudot la même année. Le titre reprend le magnifique vers central du poème de Toulet.

 


 

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16 mai 2013 4 16 /05 /mai /2013 05:09

 

 

paul-jean-toulet.jpg

 

Paul-Jean TOULET    

 

 

*

 

 

Il pleuvait    

 

Il pleuvait. Les tristes étoiles
    Semblaient pleurer d’ennui.
Comme une épée, à la minuit,
    Tu sautas hors des toiles.

— Minuit ! Trouverai-je une auto,
    Par ce temps ? Et le pire,
C’est mon mari. Que va-t-il dire,
    Lui qui rentre si tôt ?

— Et s’il vous voyait sans chemise,
    Vous, toute sa moitié ?
— Ne jouez donc pas la pitié.
    — Pourquoi ?... Doublons la mise.

 

Paul-Jean Toulet 

Contrerimes, 6.

 

 

 

 

Buffet

...— Et s’il vous voyait sans chemise, ...

 

Bernard BUFFET

 Jeux de dames, 1970.



Paul-Jean Toulet (1867-1920) est un écrivain et poète français, célèbre par ses Contrerimes, une forme poétique qu’il a créée.

 
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6 février 2012 1 06 /02 /février /2012 07:12

 

      Il y a peu, nous donnions le très beau poème de Paul-Jean Toulet, Amarissimes. Le voici de nouveau à lire ; nous tenterons ci-dessous de répondre brièvement aux questions diverses reçues par courriel.

 

Amarissimes.(*)

 

Est-ce moi qui pleurais ainsi

    — Ou des veaux qu’on empoigne —

D’écouter ton pas qui s’éloigne,

    Beauté, mon cher souci (**)?

 

Et (je t’en fis, à pneumatique,

    Part, — sans aucun bagou (***) )

Ces pleurs, ma chère, avaient le goût

    De l’onde adriatique.

 

Oui, oui : mais vous parlez de cri,

    Quand je repris ma lettre.

Grands dieux !... J’aurais mieux fait, peut-être,

    D’écrire à son mari.

 

 

Paul-Jean TOULET in Contrerimes, 20

 

 

 

* Signification du titre : Amarissimes serait un néologisme provenant du latin amarissimae, qui signifierait très amer.

** Beauté, mon cher souci : hommage et clin d'œil de Toulet au grand Malherbe et à son célèbre poème Beauté, mon cher souci dont voici les deux premiers alexandrins :

 

Beauté, mon cher souci, de qui l'âme incertaine 

A, comme l'Océan, son flux et son reflux (...) 

 

Le poème sera publié intégralement demain.

 

*** Bagou: Bavardage volubile où entrent de la hardiesse, de l'effronterie et l'envie de duper l'interlocuteur.

" Tout en parlant ainsi, avec cette facilité de paroles de la femme et de la Parisienne qui s'appelle bagou dans le langage de Paris, les yeux de Madame Mauperin, (...), étaient machinalement tombés sur de la lumière remuée par les mains de l'abbé..."

E. et J. DE GONCOURT, Renée Mauperin, 1864 

 

 


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10 décembre 2011 6 10 /12 /décembre /2011 07:52

 

 

 

Tel variait au jour changeant

Tel variait au jour changeant
- Avec l'or de tes boucles,
Le sang d'un collier d'escarboucles
Dans ma tasse d'argent

Qui, tout de roses couronnée,
- Sur la ligne où se joint
L'ombre au soleil - jetait au loin
Une pourpre alternée ;

Lilith, et, telle, un jour d'été,
J'ai vu noircir ta joue,
Quand le désir trouble, et déjoue,
Ta pliante fierté.

(Talmud babylon.)

Paul-Jean TOULET 

 

Cabanel.-La-naissance-de-Venus.jpg

...- Avec l'or de tes boucles,...

 

 

Alexandre CABANEL. La Naissance de Vénus, 1863.

Peintre officiel du Second Empire, il a réalisé la Naissance de Vénus que Napoléon III a lui-même acquis pour sa collection personnelle. Alexandre Cabanel devient célèbre à la fois pour ses portraits, que l’on s’arrache de Baltimore à Saint-Pétersbourg, mais aussi pour son répertoire de grands sujets spectaculaires : Phèdre, Cléopâtre, Othello et Desdémone…


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4 décembre 2011 7 04 /12 /décembre /2011 08:12

 

 

 

Amarissimes.

 

Est-ce moi qui pleurais ainsi

    — Ou des veaux qu’on empoigne —

D’écouter ton pas qui s’éloigne,

    Beauté, mon cher souci ?

 

Et (je t’en fis, à pneumatique,

    Part, — sans aucun bagou)

Ces pleurs, ma chère, avaient le goût

    De l’onde adriatique.

 

Oui, oui : mais vous parlez de cri,

    Quand je repris ma lettre.

Grands dieux !... J’aurais mieux fait, peut-être,

    D’écrire à son mari.

 

 

Paul-Jean TOULET in Contrerimes, 20

 

 

 

drolling-homme-nu--.jpg

 

...Grands dieux !... J’aurais mieux fait, peut-être,

    D’écrire à son mari.

 

 

Illustration : Martin Drölling (1752-1817).  Homme nu, assis et écrivant. 

Palais des Beaux-Arts de Lille.

 

 


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3 octobre 2011 1 03 /10 /octobre /2011 06:59

 

 

 

 

Il pleuvait. Les tristes étoiles
    Semblaient pleurer d’ennui.
Comme une épée, à la minuit,
    Tu sautas hors des toiles.

— Minuit ! Trouverai-je une auto,
    Par ce temps ? Et le pire,
C’est mon mari. Que va-t-il dire,
    Lui qui rentre si tôt ?

— Et s’il vous voyait sans chemise,
    Vous, toute sa moitié ?
— Ne jouez donc pas la pitié.
    — Pourquoi ?... Doublons la mise.

Paul-Jean Toulet in Contrerimes, 6.

 

 

 

 

Buffet

...— Et s’il vous voyait sans chemise, ...

 

Illustration : Bernard BUFFET. Jeux de dames, 1970.



Paul-Jean Toulet (1867-1920) est un écrivain et poète français, célèbre par ses Contrerimes, une forme poétique qu’il a créée.

 
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21 mai 2011 6 21 /05 /mai /2011 07:13

#456

 

 

A Londres je connus Bella

 

A Londres je connus Bella,

Princesse moins lointaine

Que son mari le capitaine

Qui n’était jamais là.

 

Et peut-être aimait-il la mangue ;

Mais Bella, les Français

Tels qu’on le parle : c’est assez

Pour qui ne prend que langue ;

 

Et la tienne vaut un talbin.

Mais quoi ? Rester rebelle,

Bella, quand te montre si belle

Le désordre du bain ?

 

 

Paul-Jean Toulet in  Contrerimes

 

 

Paul-Jean Toulet (1867-1920) est un écrivain et poète français, célèbre pour son recueil Contrerimes, une forme poétique qu’il a créée. 

 

 

 *                      *                      * 

 

 Degas vers 1895

 

...Rester rebelle,

Bella, quand te montre si belle

Le désordre du bain ?

 

 

 

Edgar DEGAS (1834 - 1917) Après le bain, femme s'essuyant la Nuque - vers 1895 -

On retient essentiellement chez E.DEGAS ses toiles représentants les danseuses. D'ailleurs lui-même écrit un jour : " On m'appelle le peintre des danseuses". Toutefois, on rappellera que le thème essentiel de son oeuvre s’inscrit dans ce que l’on pourrait appeler “Femmes à leur toilette”.  

 

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