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31 mars 2011 4 31 /03 /mars /2011 06:31

 

Frédéric Schiffter est un philosophe contemporain. Il vient de recevoir le prix Décembre (« l’anti-Goncourt ») pour son dernier ouvrage Philosophie sentimentale. Il se définit comme suit : « Que puis-je savoir ? Que dois-je faire ? Que m'est-il permis d'espérer ? Qu'est-ce que l'homme ? Telles sont, selon Kant, les quatre questions essentielles de la philosophie. Je me les suis posées. À chacune, j'ai répondu : rien. Mais sans doute ne suis-je pas ce qu'on appelle un "philosophe". »

Sur son blog, il donnait hier cette réflexion qu'il nous autorise à publier. Nous le remercions vivement de sa confiance.

 

 

Folklore personnel

 

Le cafard s’éprouve comme un sentiment de dépaysement dans le temps, tantôt pénible tantôt voluptueux, comme peut l’être le boitement des sensations à la suite d’un décalage horaire. Il ne touche qu’un petit nombre d’individus, qui, par-delà les époques et leurs différences nationales, forment une confrérie secrète de la déréliction. Ils se reconnaissent entre eux à une façon commune de sentir le monde, les êtres et, aussi, d’en parler. Comme ces exilés qui, même après de longues années passées dans leur pays d’accueil, conservent les habitudes de leur patrie d’origine et l’accent de leur langue maternelle, les cafardeux, en proie à la nostalgie d’un temps où ils n’existaient pas, affichent un air de paradoxale étrangeté. Car, à juger le regard avec lequel ils balayent ou scrutent le monde, entre blasement et étonnement, ils ne donnent pas l’impression de débarquer, mais, au contraire, de se trouver là depuis toujours. Ce qui ne les empêche pas d’être aussi de «parfaits flâneurs», comme dirait Baudelaire, ou encore des «princes de l’observation» aimant à «élire domicile dans le nombre, dans l’ondoyant, dans le mouvement, dans l’infini», non pour s’y dissoudre, mais pour «jouir de leur incognito». Les cafardeux n’ont pas de patrie, mais une ou deux terrasses de cafés attitrées.

 

 

©F.Schiffter.

 



Bibliographie de  F.Schiffter.

                Métaphysique du frimeur (Lettre sur l'élégance), Milan (1985, 2003)

                Sur le blabla et le chichi des philosophes, PUF, Perspectives critiques, 2001)

                Pensées d’un philosophe sous Prozac, Milan 2002

                Le plafond de Montaigne, éd. Milan, Pause philo, 2004

                Contre Debord, PUF, Perspectives critiques, 2004

                Petite philosophie du surf, éd. Milan 2005

                Le philosophe sans qualités, Flammarion, 2006

                Traité du cafard, Finitude, 2007

                Le bluff éthique, Flammarion, 2008

                Délectations moroses, le Dilettante, 2009

Schiffter.gif

                Philosophie sentimentale, Flammarion, 2010 - Prix Décembre 2010

 


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