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22 décembre 2010 3 22 /12 /décembre /2010 15:53

 

 

Les pas

Tes pas, enfants de mon silence,
Saintement, lentement placés,
Vers le lit de ma vigilance
Procèdent muets et glacés
.

Valery--les-pas.jpgPersonne pure, ombre divine,
Qu'ils sont doux, tes pas retenus !
Dieux !... tous les dons que je devine
Viennent à moi sur ces pieds nus
!

Si, de tes lèvres avancées,
Tu prépares pour l'apaiser,
A l'habitant de mes pensées
La nourriture d'un baiser,

Ne hâte pas cet acte tendre,
Douceur d'être et de n'être pas,
Car j'ai vécu de vous attendre,
Et mon coeur n'était que vos pas.
 

 

  • Illustration : Si, de tes lèvres avancées,...

 

Paul Valéry in Charmes 1922



Note, sur la pointe des...pas : « Les Pas » pourraient s’interpréter de deux manières différentes, mais complémentaires. Ceux qui s’attachent à la signification immédiate du texte y verront une peinture de l’attente amoureuse, de l’émotion d’un homme durant les instants qui précèdent le retour de la femme aimée. D’autres, plus sensibles au symbole, considèreront cette femme comme la Muse du poète, et son approche comme la naissance de l’inspiration. Pleine liberté est laissée au lecteur de choisir entre ces deux interprétations.
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21 décembre 2010 2 21 /12 /décembre /2010 17:17

bouleaux.jpg

 

ZWIEGESTALT

 

Laß dein Aug in der Kammer sein eine Kerze,

den Blick einen Docht,

laß mich blind genug sein,

ihn zu entzünden.

 

 

Nein.

Laß anderes sein.

 

Tritt vor dein Haus,

schirr deinen scheckigen Traum an,

laß seine Hufe reden

zum Schnee, den du fortbliest

von First meiner Seele.

 

Paul Celan. Von Schwelle zu Schwelle, 1955

 

FIGURE DOUBLE

 

Fais que ton oeil dans la chambre soit une bougie,

ton regard une mèche,

fais-moi être assez aveugle

pour l'allumer.

 

 

Non.

Fais qu'autre chose soit.

 

 

Avance devant ta maison,

harnache ton songe pie,

fais parler son sabot

à la neige que tu as soufflée

du faîtage de mon âme.

 

Paul Celan. De Seuil en Seuil. -1955 –

traduction Jean-Pierre Lefebvre.


Illustration : un bosquet de bouleaux.

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21 décembre 2010 2 21 /12 /décembre /2010 00:43


 

Décidément, l'hiver inspire nos poètes ; vous savez ? nos cousins qui parlent un si beau français et qui aiment tant notre pays.

 

Robert Charlebois. Je reviendrai à Montréal. -1976-



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20 décembre 2010 1 20 /12 /décembre /2010 16:06


 

Demain l'hiver

Demain l'hiver, je m'en fous.
Je m'en vais dans le sud, au soleil,
Me baigner dans la mer
Et je penserai à vous
En plantant mes orteils dans le sable doux.

Je vous laisse "Mon pays, ce n'est pas un pays,
C'est l'hiver" chanté par les charrues.
Je vous laisse mon "scraper" et ma pelle de bois
Pour vous rendre à la rue.
Je vous laisse la petite glace dans l'escalier tournant
Qui vous fera tomber su'l.
Je vous laisse ma paix.
Je vous donne ma paix.
Je me pousse en paix avec les canards.

Demain l'hiver, je m'en fous.
Je m'en vais dans le sud, au soleil,
Me baigner dans la mer
Et je penserai à vous
Assis dans la soupe bleue jusqu'au cou.

Je vous laisse les enfants qui s'assomment en se "pitchant"
Des balles de neige en glace en pleine face.
Je vous laisse les enfants qui ont la langue collée
Sur les "tracks" et qui pleurent parce que le train s'en vient.
Je vous laisse les enfants mangés par la souffleuse
À quatre heures dans un fort top secret.
Je vous laisse ma paix.
Je vous donne ma paix.
Je me pousse en paix avec les canards.

Demain l'hiver, je m'en fous.
Je m'en vais dans le sud, au soleil,
Me baigner dans la mer
Et je penserai à vous
En priant le soleil dans l'eau à genoux.

Je vous laisse "le but du Canadien compté
Par Jean Béliveau sans aide."
Je vous laisse les pieds gelés dans la
"slotch", un transfert entre les dents.
Je vous laisse mes chaloupes dans le portique,
Mes mitaines et ma gratte en plastique.
Je vous laisse ma paix.
Je vous donne ma paix.
Je me pousse en paix avec les canards.

Demain l'hiver, je m'en fous.
Je m'en vais dans le sud, au soleil,
Me baigner dans la mer
Et je penserai à vous
En plantant mes orteils dans le sable doux.

 
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20 décembre 2010 1 20 /12 /décembre /2010 08:51

l-horloge.jpg

 

 

L’Horloge.

 

 

Horloge ! dieu sinistre, effrayant, impassible,

Dont le doigt nous menace et nous dit: "Souviens-toi !

Les vibrantes Douleurs dans ton coeur plein d'effroi

Se planteront bientôt comme dans une cible ;

 

Le Plaisir vaporeux fuira vers l'horizon

Ainsi qu'une sylphide au fond de la coulisse ;

Chaque instant te dévore un morceau du délice

A chaque homme accordé pour toute sa saison.

 

Trois mille six cents fois par heure, la Seconde

Chuchote : Souviens-toi ! - Rapide, avec sa voix

D'insecte, Maintenant dit : Je suis Autrefois,

Et j'ai pompé ta vie avec ma trompe immonde !

 

Remember ! Souviens-toi ! Prodigue ! Esto memor !

(Mon gosier de métal parle toutes les langues.)

Les minutes, mortel folâtre, sont des gangues

Qu'il ne faut pas lâcher sans en extraire l'or !

 

Souviens-toi que le Temps est un joueur avide

Qui gagne sans tricher, à tout coup ! C'est la loi.

Le jour décroît ; la nuit augmente ; souviens-toi !

Le gouffre a toujours soif ; la clepsydre se vide.

 

Tantôt sonnera l'heure où le divin Hasard,

Où l'auguste Vertu, ton épouse encor vierge,

Où le Repentir même (oh ! la dernière auberge !),

Où tout te dira Meurs, vieux lâche ! Il est trop tard !"

 

 

 

Charles BAUDELAIRE  

Les Fleurs du Mal.

-1861- Poème LXXXV de la section « Spleen et Idéal ».


 

2010.png

      L'horloge du beffroi de Douai le 20 décembre 2010 à 11h40.


 

Note : « L'Horloge » clôt la longue série de poèmes consacrés au Temps : « L'Ennemi », « Chant d'automne », « Spleen », « Le Goût du néant ». Ce poème marque l'aboutissement d'un parcours qui sanctionne l'échec de l'Idéal et la victoire du Spleen.


 

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19 décembre 2010 7 19 /12 /décembre /2010 16:29

oeil-magritte.jpg

Illustration : Le faux miroir de René Magritte

 



Rectificatif du 19 décembre 2010 :

Comme déjà évoqué, Paul Celan se donne la mort en se jetant dans la Seine le 20 avril 1970.

C’est en juin 1970 qu’interviendra la publication de Lichtzwang (Contrainte de lumière) qu’avait déjà prévue Celan. ICH KANN DICH NOCH SEHN est donc un oeuvre posthume publiée dans Lichtzwang. Dans une lettre datée du 7 novembre 1969, il écrivait à Nelly Sachs : « J’ai encore terminé un nouveau recueil de poèmes, il paraîtra en juillet de l’année prochaine, je me réjouis à l’idée de pouvoir alors te le donner », in CorrespondanceNous devons cette précision à Thomas, visiteur attentionné de Nuageneuf, que nous accueillons chaleureusement et remercions pour son attention.

ICH KANN DICH NOCH SEHN : ein Echo,

ertastbar mit Fühl-

wörtern, am Abschieds-

grat.

 

Dein Gesicht scheut leise,

wenn es auf einmal

lampenhaft hell wird

in mir, an der Stelle,

wo man am schmerzlichsten Nie sagt.

 

Proposition de traduction : 


JE PEUX TE VOIR ENCORE : un écho,

palpable par mots-

tactiles sur l’arête

de l’adieu.

 

Ton visage s’effarouche doucement

lorsque d’un coup

il devient clair comme lampe en moi

à l’endroit

où l’on dit au plus douloureusement Jamais.

 

Paul Celan, in Lichtzwang (Contrainte de lumière). Posthume.

 

Note : après vérification des sources, Celan écrit Nie avec un N majuscule. Nous mettons donc la majuscule à Jamais.

 

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17 décembre 2010 5 17 /12 /décembre /2010 00:58

 

Philosophie magazine. En voilà un bel objet ! Un magazine tout en plaisirs pour l’œil et les neurones. À la une, le visage clair-obscur d’une nymphette médiévale, pour vous remémorer qui vous savez.

philo mag juin 2010

Illustration : le numéro de juin 2010.

«Crois-moi, démon aux éruptions tapageuses et infernales ! les grands événements, ce ne sont pas nos heures les plus bruyantes, mais nos heures les plus silencieuses.»  dit Nietzsche.

 

Oui, un beau magazine. À la page de l’édito, même le rédacteur en chef (Alexandre Lacroix) a de la gueule, c’est tout dire. Il a même trouvé le moyen de montrer sa belle bouille dans un petit encart en haut à droite. Pas pour rien qu’il a reçu le prix : «Élu magazine de l’année 2010». Quand la philosophie séduit, qui se plaindra ?

article_lacroix.jpg

Mais le propos est ailleurs. Dans chaque numéro, une page recto verso en fin de magazine est consacrée à quelques jeux et tests divers fort intéressants. Exemple : envoyer une légende en rapport avec une photo ou un dessin. Le mois dernier, la photo à légender était celle de Simone. On se souvient des étranglements offusqués de la gôôche germanopratine après que le Nouvel Obs sacrilège l’a mis en couverture de son numéro du 3 janvier 2008 ! « Touche pas à ma Simone ! »

simone-beauvoir-Chicago-1952-Art-Shay.jpg 

Simone de Beauvoir. Chicago 1952 . Art SHAY.

Les légendes retenues sont savoureuses. Les gagnant(e)s sont :

 1er : « Le deuxième sexe a bon dos, ne baissons pas les bras ! » Michèle Birgi.

2ème : « On a beau voir, on n’en croit pas ses idées. » Albert Woda.

3ème : « La postérité regarde toujours derrière. » Véronique Riffault

Frédéric Thellery.

ps : sexistes incultes, nous préférons la 2ème à la 1ère !

 


Annexe : L’histoire de la photo narrée au Nouvel Obs par Art Shay, si la lecture vous en dit.Ca a l'avantage de remettre quelques pendules à l'heure : (clic)

 


 

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15 décembre 2010 3 15 /12 /décembre /2010 10:32

 le-roi-et-l-huitre.png

      

 

Le Rat et l'Huitre.

 

Un Rat hôte d'un champ, Rat de peu de cervelle,
Des Lares paternels un jour se trouva sou.
Il laisse là le champ, le grain, et la javelle,
Va courir le pays, abandonne son trou.
Sitôt qu'il fut hors de la case,
Que le monde, dit-il, est grand et spacieux !
Voilà les Apennins, et voici le Caucase :
La moindre taupinée était mont à ses yeux.
Au bout de quelques jours le voyageur arrive
En un certain canton où Thétys sur la rive
Avait laissé mainte Huître ; et notre Rat d'abord
Crut voir en les voyant des vaisseaux de haut bord.
Certes, dit-il, mon père était un pauvre sire :
Il n'osait voyager, craintif au dernier point :
Pour moi, j'ai déjà vu le maritime empire :
J'ai passé les déserts, mais nous n'y bûmes point.
D'un certain magister le Rat tenait ces choses,
Et les disait à travers champs ;
N'étant pas de ces Rats qui les livres rongeants
Se font savants jusques aux dents.
Parmi tant d'Huîtres toutes closes,
Une s'était ouverte, et bâillant au Soleil,
Par un doux Zéphir réjouie,
Humait l'air, respirait, était épanouie,
Blanche, grasse, et d'un goût, à la voir, nonpareil.
D'aussi loin que le Rat voir cette Huître qui bâille :
Qu'aperçois-je ? dit-il, c'est quelque victuaille ;
Et, si je ne me trompe à la couleur du mets,
Je dois faire aujourd'hui bonne chère, ou jamais.
Là-dessus maître Rat plein de belle espérance,
Approche de l'écaille, allonge un peu le cou,
Se sent pris comme aux lacs ; car l'Huître tout d'un coup
Se referme, et voilà ce que fait l'ignorance.

Cette Fable contient plus d'un enseignement.
Nous y voyons premièrement :
Que ceux qui n'ont du monde aucune expérience
Sont aux moindres objets frappés d'étonnement :
Et puis nous y pouvons apprendre,
Que tel est pris qui croyait prendre.

 

      Jean de La Fontaine. Fable IX - Livre VIII .



  

Note 1 : On a longtemps pensé que La Fontaine s’était inspiré des « Emblèmes » d’ Alciat. Mais le fabuliste a certainement eu connaissance d’une version française plus tardive d’un ouvrage intitulé « Le Rat domestique et l’ Huître », œuvre parue en 1595 et signée Gilles Romain. Ce dernier présentait d'ailleurs déjà son œuvre comme une adaptation d’Esope. 
 

Note 2 : Quelques éclaircissements de vocabulaire, toujours utiles aux plus jeunes ...et aux autres :

Les lares sont à la fois les divinités veillant sur un foyer et l’habitation elle-même.

Sou: Une autre manière d’écrire « saoul » ; La Fontaine l’utilise pour la rime. Certains auteurs reprennent cependant la graphie moderne.

Téthys: Il s’agit de la déesse de la mer, à ne pas confondre avec Thétis, mère dAchille...voire même avec Tétris !!! 

(Tetris est un jeu vidéo de puzzle conçu en 1984 par Alexei Pajitnov. Bâti sur des règles simples et exigeant intelligence et adresse, il est l'un des jeux vidéo les plus populaires au monde. Ses versions sont innombrables, y compris en 3D, et cette multiplicité se décline sur tous les types d'ordinateurs. Selon des chiffres de 2010, il en a été vendu à plus de 170 millions d'exemplaires.)

Nompareil:  Ou « nonpareil ». Graphie ancienne pour « non pareil ».

Victuaille: S’employait parfois au singulier.

Aux lacs: Aux lacets c’est-à-dire au piège.

 

 



luchini.jpg 

Cela fait plus de vingt ans que Fabrice Luchini se produit seul en scène. Il a commencé, souvenir mémorable, en disant des textes de Louis-Ferdinand Céline et de La Fontaine. Il savait les textes, bien sûr, mais il les lisait, tenant le livre en main comme un talisman. A l'époque, Luchini lançait, sans le savoir, une mode qui a fait florès -un acteur seul en scène tutoyant de grands textes aimés. Et c’est après la récitation d’une fable qu’il disait :  

 - "C’est fin. C’est ça et c’est tout. C’est final, La Fontaine."  Quatre mots (fin, ça, tout, final) et tout est dit sur La Fontaine.


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15 décembre 2010 3 15 /12 /décembre /2010 00:05

la-halle-aux-chaussures-en-ligne.jpg

 

 

 

 

Les Quick hallal ne me gênent pas. Ils n’ont rien inventé.

 

Avant eux, il y a eu l’Hallal aux chaussures et on en a pas fait tout un fromage.

En plus, c’est pasher !

 

 

Lechim Authex.

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14 décembre 2010 2 14 /12 /décembre /2010 00:42

 

 

 

petrus-2000.jpg

 

Comme de toute chose, il y a un secret du vin ; mais c'est un secret qu'il ne garde pas. On peut le lui faire dire : il suffit de l'aimer, de le boire, de le placer à l'intérieur de soi-même. Alors il parle. En toute confiance, il parle.

 

Francis PONGE.

 

 

 

 

 

 

Note : Ce texte est un court extrait des travaux de Ponge dans Pièces. Lorsqu'il s'arrête sur le vin et son secret, c'est dans le cadre d'une comparaison avec l'eau. Et son raisonnement prend alors une toute autre amplitude : " Tandis que l'eau garde mieux son secret ; du moins est-il beaucoup plus difficile à déceler, à saisir."


 

relire et situer PONGE

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