On commence en effet par un bête Kärcher
Et on finit par vouloir nettoyer
Tout ce qui est kasher
Sous prétexte qu’à une lettre près
C’est la même affaire !
C’est comme l’oiseau
Quand on commence à trouver qu’il se répète
Et que son chant devient oiseux,
On décrète qu’il faut le faire taire
Ou lui arracher les yeux !
Pauvre oiseau dont Queneau – toujours lui ! –
Disait que cru, il faisait cui-cui
Mais que cuit, il ne le faisait plus !
Le Poète aussi ! Si ce qu’il écrit
En dit trop sur ce qui est tu,
C’est pan-pan-Q.I.
Et à fortiori si ce qu’il ne tait
Est ce qui tue,
C’est pan-pan sans cri, pan-pan tout cru ! »
Jean-Pierre Verheggen
Sodome et Grammaire
NRF – Editions Gallimard 2008
« …un petit poème pour que je puisse poésir pour moins mourir »
Belge comme il se doit, héritier des surréalismes et des zuteries, Jean-Pierre Verheggen publie ses premiers textes dans Les lettres françaises, avec le soutien de Louis Aragon. En 1969 il fonde avec Christian Prigent la revue TXT et anime des émissions à la radio belge d’expression française. Il entreprend des tournées de « performances » et reçoit en 1995 le grand prix de l’humour noir . Depuis, il continue malgré quelques grands rendez-vous manqués avec la Camarde.
1942. Naissance à Gembloux, le 6 juin.
Jean-Pierre Verheggen sera enseignant (professeur de français) avant de s'attacher au ministère de la Culture.
1968. La grande mitraque (Henry Fagne).
1969. Collaboration à la revue TXT, dès le premier numéro.
1978. Le degré Zorro de l'écriture et Divan le terrible l'année suivante (Bourgois, collection « TXT »). 1990. Les Folies-belgères (Seuil) et Artaud Rimbur (La Différence).
1994. Ridiculum vitæ (La Différence), Grand prix de l'humour noir.
2001. On n'est pas sérieux quand on a 117 ans (Gallimard).
2009. L'Oral et Hardi, mis en scène et interprété par Jacques Bonnaffé, Molière de la compagnie
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à propos de son dernier livre :
Un jour, je serai Prix Nobelge
Hors série Littérature, Gallimard
Parution : 05-04-2013
Auteur, entre autres, de Frites l’amour, pas la guerre ou de Votez verres, votez alcoolos à septante ans (soixante-dix pour les étrangers), Jean-Pierre Verheggen a estimé qu’il méritait de se voir attribuer le «Prix Nobelge». D’où ce dossier de candidature comprenant le rappel des distinctions qu’il a déjà reçues ; son CV (à ne pas confondre avec son Ridiculum Vitae révélé au public en 2001 dans la collection Poésie/Gallimard) suivi de la liste des nombreux textes inédits qu'il entend soumettre à l’examen des membres du jury et même du nom des concurrents qu’il craint de devoir affronter (sans toutefois les redouter) : Henri Michaux et Marie-Thérèse Philippot en Wallonie, Hergé à Bruxelles mais, en revanche, personne en Flandre, même pas le Flamand de Lady Chatterley.
Du Degré Zorro de l'écriture paru dans les années soixante-dix aux Éditions Christian Bourgois, dans la collection TXT, à L'Oral et Hardi, un choix de ses textes qui a valu à son metteur en scène et interprète Jacques Bonnaffé un Molière en 2009, Jean-Pierre Verheggen, comme l'écrit André Velter, «n'a cessé de mener à bride abattue l'une des plus toniques chevauchées verbales. En liberté dans les fourrés et les coups fourrés du langage, Verheggen donne une œuvre qui est à percevoir dans la résonance de sa voix, avec sa verve de grande déferlante, son swing de boxeur des lettres, sa fantaisie féroce et irrésistible».
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