Source : Dépêche AFP. Déclaration de F.Hollande du 16.10.2011 à 10h35.
"Je veux ré-enchanter le rêve !"
Source : Dépêche AFP. Déclaration de F.Hollande du 16.10.2011 à 10h35.
"Je veux ré-enchanter le rêve !"
La lessive
Chaque semaine, mes parents,
Cinq tantes, dix oncles, vingt nièces,
Cent cousins, des petits, des grands,
Se pressent dans la même pièce.
Dans la machine, ils introduisent
Mille corsages et chemises,
Cent mille slips et pyjamas,
Un million de paires de draps.
Nylon, dentelles ou guenilles,
Chaque semaine nous avons
Cette habitude : nous lavons
Notre linge sale en famille.
Jacques Charpentreau
Je ne vous ferai pas de vers
Je ne vous ferai pas de vers,
Madame, blonde entre les blondes,
Vous réduirez trop l'univers,
Vous seriez reine sur les mondes.
Vos yeux de saphir, grands ouverts,
Inquiètent comme les ondes
Des fleuves, des lacs et des mers
Et j'en ai des rages profondes.
Mais je suis pourtant désarmé
Par la bouche, rose de mai,
Qui parle si bien sans parole,
Et qui dit le mot sans pareil,
Fleur délicieusement folle
Eclose à Paris, au soleil.
Charles CROS.
...Vos yeux de saphir, grands ouverts,
Yves Klein. Anthropométries, 1960.
Terre-Lune
Terre Lune, Terre Lune
Ce soir j'ai mis mes ailes d'or
Dans le ciel comme un météore
Je pars
Terre Lune, Terre Lune
J'ai quitté ma vieille atmosphère
J'ai laissé les morts et les guerres
Au revoir
Dans le ciel piqué de planètes
Tout seul sur une lune vide
Je rirai du monde stupide
Et des hommes qui font les bêtes
Terre Lune, Terre Lune
Adieu ma ville, adieu mon cœur
Globe tout perclus de douleurs
Bonsoir.
Boris Vian
Un poète
C’est un être unique
A des tas d’exemplaires
Qui ne pense qu’en vers
Et n’écrit qu’en musique
Sur des sujets divers
Des rouges et des verts
Mais toujours magnifiques
Boris Vian,1920-1959.
La Faune
Et toi, que manges-tu, grouillant ?
— Je mange le velu qui digère le pulpeux qui ronge le rampant.
Et toi, rampant, que manges-tu ?
— Je dévore le trottinant qui bâfre l’ailé qui croque le flottant.
Et toi, flottant, que manges-tu ?
— J’engloutis le vulveux qui suce le ventru qui mâche le sautillant.
Et toi sautillant que manges-tu ?
— Je happe le gazouillant qui gobe le bigarré qui égorge le galopant.
Est-il bon, chers mangeurs, est-il bon le goût du sang ?
— Doux, doux ! tu ne sauras jamais comme il est doux, herbivore !
Norge
...Est-il bon, chers mangeurs, est-il bon le goût du sang ?
Rembrandt. Le boeuf écorché.
Soutine. Etude sur Le boeuf écorché de Rembrandt.
Peintre français d'origine russe issu d'une famille juive, Chaïm Soutine fréquenta l'Académie de Vilnius, de 1910 à 1913, après avoir péniblement surmonté l'opposition de sa famille et de la communauté juive. En 1913, il se rendit à Paris où il fréquenta l'atelier du peintre Fernand Cormon à l'Académie des Beaux-Arts. Mais ce furent surtout les oeuvres conservées au Musée du Louvre qui attirèrent Soutine : il put notamment y admirer Rembrandt, Goya et Courbet. En 1915, l'artiste fit la rencontre de Modigliani, avec lequel il tissa une solide amitié qui lui permit de s'insérer dans le monde artistique parisien.
Amarissimes.
Est-ce moi qui pleurais ainsi
— Ou des veaux qu’on empoigne —
D’écouter ton pas qui s’éloigne,
Beauté, mon cher souci ?
Et (je t’en fis, à pneumatique,
Part, — sans aucun bagou)
Ces pleurs, ma chère, avaient le goût
De l’onde adriatique.
Oui, oui : mais vous parlez de cri,
Quand je repris ma lettre.
Grands dieux !... J’aurais mieux fait, peut-être,
D’écrire à son mari.
Paul-Jean TOULET in Contrerimes, 20
...Grands dieux !... J’aurais mieux fait, peut-être,
D’écrire à son mari.
Illustration : Martin Drölling (1752-1817). Homme nu, assis et écrivant.
Palais des Beaux-Arts de Lille.
Le désir de garder est aussi inséparable du désir de détruire. C'est que garder, c'est perdre. Si pour garder la trace de ce qui se passe maintenant, je prends une note pour ne pas l'oublier, je l'inscris sur du papier, et je la mets dans ma poche. Si ça s'arrête là ça veut dire que je perds, que j'expose le papier à sa perte. Pour garder, il faut que j'expose à la perte. Cette exposition à la perte, c'est un geste double dont la dualité est irréductible. Vouloir garder en mémoire, c'est exposer à l'oubli. C'est ce que j'appelle "le mal d'archive". Il y a la souffrance liée à l'archive et le désir d'archive. C'est le désir d'archive qui traverse cette expérience de la destructibilité radicale de l'archive.
Si on était sûr que la destructibilité de l'archive était accidentelle, et que dans certains cas, il peut y avoir un accident mais que tout peut être gardé en principe, il n'y aurait ni besoin d'archive, ni souci d'archive. S'il y a un souci et une souffrance de l'archive, c'est parce qu'on sait que tout peut être détruit sans restes. Non seulement sans trace de ce qui a été, mais sans mémoire de la trace, sans le nom de la trace. Et c'est ce qui est à la fois la menace de l'archive et la chance de l'archive. L'archive doit être dehors, exposé au dehors.
Jacques Derrida."Archive et brouillon" in Pourquoi la critique génétique? 1998
Jacques Derrida, 1930 -2004, est un philosophe français.
Berlin, Mémorial de l'Holocauste.
Inauguré en 2005, le Mémorial est situé dans le centre historique de Berlin, à deux pas de la Porte de Brandebourg et face à l'ambassade des Etats-Unis. Conçu par Peter Eisenman, architecte américain, il aligne 2711 stèles de béton gris anthracite, toutes identiques en longueur et largeur, seules les hauteurs diffèrent.
Nous poursuivons la publication d'extraits arbitrairement choisis
dans le Journal de Jules RENARD.
5 janvier.
Ses gestes surtout le distinguaient. Il prenait des mots à même sa bouche et, les enlevant, les faisait miroiter un moment entre ses doigts, comme des bagues.
7 janvier.
Docquois me dit :
-- Ce que vous faites, ce sont des feuilles qui tombent d'un arbre. Ceux qui ne comprennent pas se demandent où est l'arbre.
Lire toujours plus haut que ce qu'on écrit.
Le sourire est le commencement de la grimace.
11 janvier.
La volupté du mensonge.
Quand il fait l'éloge de quelqu'un, il lui semble qu'il se dénigre un peu.
Il s'endettait, dans la mesure de ses ressources.
Dévisager les gens pour se faire l'oeil.
...à suivre, bien entendu...
La grenouille aux souliers percés
La grenouille aux souliers percés
A demandé la charité
Les arbres lui ont donné
Des feuilles mortes et tombées
Les champignons lui ont donné
Le duvet de leur grand chapeau
L'écureuil lui a donné
Quatre poils de son manteau
L'herbe lui a donné
Trois petites graines.
Le ciel lui a donné
Sa plus douce haleine
Mais la grenouille demande toujours,
Demande encore la charité
Car ses souliers sont toujours,
Sont toujours percés.
Robert Desnos
...Les arbres lui ont donné
Des feuilles mortes et tombées...
Claude Monet, Effet d'automne à Argenteuil, 1873.