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18 février 2014 2 18 /02 /février /2014 06:21

 

 

 


 

Lettre à l'étoile

 

Tu es de celles qui savent

Lire par dessus l'épaule

Je n'ai même pas besoin

Pour toi, de chercher mes mots,

Depuis longtemps ils attendent,

A l'ombre de mon silence

Derrière les lèvres closes

Et les distances moroses

A force d'être si grandes.

Mais, vois, rien ne les dénonce,

Nous ne sommes séparés

Par fleuves ni par montagnes,

Ni par un bout de campagne,

Ni par un seul grain de blé.

 

Rien n'arrête mon regard

Qui te trouve dans ton gîte

Plus vite que la lumière

Ne descend du haut du ciel

Et tu peux me reconnaître

A la luisante pensée

Qui parmi tant d'autres hommes

Elève à toi toute droite

Sa perspicace fumée.

 

Mais c'est le jour que je t'aime

Quand tu doutes de ta vie

Et que tu te réfugies

Aux profondeurs de moi-même

Comme dans une autre nuit

Moins froide, moins inhumaine.

 

Ah sans doute me trompé-je

Et vois-je mal ce qui est.

Tu n'auras jamais douté,

Toi si fixe et résistante

Et brillante de durée,

Sans nul besoin de refuge

Lorsque le voile du jour

A mon regard t'a célée,

Toi, si hautaine et distraite,

Dès que le jour est tombé

Et moi qui viens et qui vais

D'une allure passagère

Sur des jambes inquiètes,

Tous les deux faits d'une étoffe

Cruellement différente

Qui me fait baisser la tête

Et m'enferme dans ma chambre.

 

Mais tu as tort de sourire

Car je n'en ai nulle envie,

Tu devrais pourtant comprendre

Puisque tu es mon amie.

 

 

Jules Supervielle

La Fable du monde, 1938

Jules SUPERVIELLE, 1884 - 1960    

 

 

 

 

Pedro-Figari-Superviele.jpg

Pedro FIGARI

Jules SUPERVIELLE

 

 

 

 

Pedro FIGARI (1861-1938) est un peintre uruguayen. Il séjournera une dizaine d'années à Paris de 1925 à 1935 où il peindra plus de 2000 toiles, dont ce portrait de Jules SUPERVIELLE.

 

 

 

                                                 __________________________________

 

 

Florence Davaille

La lettre dans la poésie de Jules Supervielle : pour une poétique de la voix humaine.


Florence Davaille a soutenu en décembre 2000 une thèse de doctorat en stylistique française intitulée :

« Ces « mots qui secrètent les choses » : écriture de la présence dans la poésie de Jules Supervielle. »

Elle a publié depuis divers articles sur l'œuvre de Supervielle, ses rapports avec son éditeur et correspondant Jean Paulhan, et certains aspects de la littérature canadienne francophone. Elle est PRAG (Professeur agrégé de l'enseignement supérieur) à l'Université de Rouen.

 

 

Présentation :

Dans une lettre à Jean Paulhan du 23 juillet 1935, Supervielle déclare : "J'espère aussi écrire quelques "lettres" en vers ou versets dont l'une "à une étoile". Il est assez frappant que si nous regardons une étoile, rien, sauf la distance, ne nous sépare d'elle. Or la distance, il faut de la réflexion pour s'en souvenir, elle n'arrête en rien le regard. Rien de corporel ne s'interpose entre l'étoile et nous, alors que sur terre - même à de petites distances - tant de choses visibles s'interposent entre les objets et nous. Et puis le fait d'écrire à une étoile, le côté lettre perdue, lettre excessivement perdue m'attire, m'a toujours ou presque attiré". 

Cet extrait, annonçant l'écriture de la fameuse "Lettre à l'étoile" qui a fait l'objet de discussions avec Jean Paulhan, évoque comment l'utilisation de la lettre en poésie est liée pour Supervielle aux exigences d'une poésie "humaine", tissant des liens entre les choses et les êtres, ailleurs représentée par l'image des "germes" qui parcourent l'espace. Pour cet épistolier dont la correspondance avec Jean Paulhan traite tant de poésie, il semble que la lettre ait pu, à un moment, ressaisir les enjeux d'une poétique qui s'était formée à travers d'autres types de textes. (...)

 

Source : Site de l'Université de Poitiers.

 


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17 février 2014 1 17 /02 /février /2014 08:47

 

 

 

 

Les-zoizeaux.jpg

 

 

 

 

 

 

 

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14 février 2014 5 14 /02 /février /2014 06:24

 

 

 

 

Rolls-Royce-2012.jpg

 

 

"Quand les autos penseront, les Rolls-Royce seront

plus angoissées que les taxis."

 

 

Henri Michaux

 

Modèle présenté :

Rolls-Royce Ghost.

Finished in Dark Indigo with Creme Light Leather. Supplied with the balance of the manufacturers warranty and service package.

 

Standard Equipment

Anti Locking Brakes, Driver and Passenger Airbags, Remote Central Locking with Alarm/Immobiliser, Keyless Entry, Push Button Stop/Start, Dynamic Stability Control, Electric Windows, Soft Close Doors, Lambswool Deep Pile Floor Mats, Rain Sensing Wipers, Head Up Display, Active Cruise Control, Satellite Navigation System, DAB Tuner, Six DVD Changer, Bluetooth Telephone Connectivity, High Beam Assistant, i Pod Connectivity, Rear View Camera with Top View.

____________________________________________________________________________________________________________

 

Henri Michaux (Namur 1899 - Paris 1984) est un écrivain, poète et peintre belge naturalisé français en 1955. Pour la petite histoire, Michaux fait ses études au Collège Saint-Michel de Bruxelles, où il a pour condisciple Norge, déjà évoqué ici.

 


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13 février 2014 4 13 /02 /février /2014 06:10

 

 

 

 

Amour.jpg                                                                                                                                                                                                              

 

 

 

 

 

 

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12 février 2014 3 12 /02 /février /2014 06:00

 

 

 

 

L-insoutenable-legerete.-Film.jpg

Affiche du film tiré du roman.    

 

L'Insoutenable Légèreté de l'être (Nesnesitelná lehkost bytí en tchèque) est le cinquième roman de Milan Kundera, écrit en 1982 et publié pour la première fois en 1984, en France.
L'intrigue se situe à Prague en 1968,et s'articule autour de la vie des artistes et des intellectuels, dans le contexte de la Tchécoslovaquie du Printemps de Prague, puis de l'invasion du pays par l'URSS.

 

kundera.jpg 

 

  (...) Tereza caresse la tête de Karenine qui repose paisiblement sur ses genoux. Elle se tient à peu près ce raisonnement : Il n'y a aucun mérite à  bien se conduire avec ses semblables. Tereza est forcée d'être correcte avec les autres villageois, sinon elle ne pourrait pas y vivre, et même avec Tomas elle est obligée de se conduire en femme aimante car elle a besoin de Tomas. On ne pourra jamais déterminer avec certitude dans quelle mesure nos relations avec autrui sont le résultat de nos sentiments, de notre amour ou non-amour, de notre bienveillance ou de notre haine, et dans quelle mesure elles sont d'avance conditionnées par les rapports de force entre individus.

    La vraie bonté de l'homme ne peut se manifester en toute pureté et en toute liberté qu'à l'égard de ceux qui ne représentent aucune force. Le véritable test moral de l'humanité ( le plus radical, qui se situe à un niveau si profond qu'il échappe à notre regard), ce sont ses relations avec ceux qui sont à sa merci : les animaux   . Et c'est ici que s'est produite la faillite fondamentale de l'homme, si fondamentale que toutes les autres en découlent.

 

    Une génisse s'est approchée de Tereza, s'est arrêtée et l'examine longuement de ses grands yeux bruns. Tereza la connaît. Elle s'appelle Marguerite. Elle aurait aimé donner un nom à toutes ses génisses, mais elle n'a pas pu. Il y en a trop. Avant, il en était encore certainement ainsi voici une trentaine d'années, toutes les vaches du village avaient un nom. (Et si le nom est le signe de l'âme, je peux dire qu'elles en avaient une, n'en déplaise à Descartes.) Mais le village est ensuite devenu une grande usine coopérative et les vaches passent toute leur vie dans deux mètres carrés d'étables. Elles n'ont plus de nom et ce ne sont plus que des "machinae animatae". Le monde a donné raison à Descartes.

 

     J'ai toujours devant les yeux Tereza assise sur une souche, elle caresse la tête de Karénine et songe à la faillite de l'humanité. En même temps, une autre image m'apparaît : Nietzsche sort d'un hôtel de Turin. Il aperçoit devant lui un cheval et un cocher qui le frappe à coups de fouet. Nietzsche s'approche du cheval, il lui prend l'encolure entre les bras sous les yeux du cocher et il éclate en sanglots.

     Ça se passait en 1889 et Nietzsche s'était déjà éloigné, lui aussi, des hommes. Autrement dit : c'est précisément à ce moment-là que s'est déclarée sa maladie mentale. Mais, selon moi, c'est bien là ce qui donne à son geste sa profonde signification. Nietzsche était venu demander au cheval pardon pour Descartes. Sa folie (donc son divorce avec l'humanité) commence à l'instant même où il pleure sur le cheval.

     Et c'est ce Nietzsche-là  que j'aime, de même que j'aime Tereza, qui caresse sur ses genoux la tête d'un chien mortellement malade. Je les vois tous deux côte à côte : ils s'écartent tous deux de la route ou l'humanité, "maître et possesseur de la nature", poursuit sa marche en avant.(...)

 

Milan Kundera

L'insoutenable légèreté de l'être, 1984 

 

 

 

 

Sandrine1 

 

 

Sandrine2

 

Illustrations de ©Sandrine Rotil— Tiefenbach     

 

 

 

 

 

 


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11 février 2014 2 11 /02 /février /2014 10:27

 

 

      Cliquez deux fois sur l'image pour obtenir une lecture de la vidéo plein écran

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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10 février 2014 1 10 /02 /février /2014 11:11

 

 

 

 

 

 

 

 

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9 février 2014 7 09 /02 /février /2014 06:12

 

 

On ne peut qu'inciter le lecteur à étudier ce texte repris dans Petits poèmes en prose

tant il recèle  de clés  pour entr'aperevoir l'âme si mystérieuse de Baudelaire. 

 

LES BIENFAITS DE LA LUNE

  

 

 

 

 

 

 

La Lune, qui est le caprice même, regarda par la fenêtre pendant que tu dormais dans ton berceau, et se dit: "Cette enfant me plaît."

   Et elle descendit moelleusement son escalier de nuages et passa sans bruit à travers les vitres. Puis elle s'étendit sur toi avec la tendresse souple d'une mère, et elle déposa ses couleurs sur ta face. Tes prunelles en sont restées vertes, et tes joues extraordinairement pâles. C'est en contemplant cette visiteuse que tes yeux se sont si bizarrement agrandis; et elle t'a si tendrement serrée à la gorge que tu en as gardé pour toujours l'envie de pleurer.

   Cependant, dans l'expansion de sa joie, la Lune remplissait toute la chambre comme une atmosphère phosphorique, comme un poison lumineux; et toute cette lumière vivante pensait et disait: "Tu subiras éternellement l'influence de mon baiser. Tu seras belle à ma manière. Tu aimeras ce que j'aime et ce qui m'aime: l'eau, les nuages, le silence et la nuit; la mer immense et verte; l'eau uniforme et multiforme; le lieu où tu ne seras pas; l'amant que tu ne connaîtras pas; les fleurs monstrueuses; les parfums qui font délirer; les chats qui se pâment sur les pianos et qui gémissent comme les femmes, d'une voix rauque et douce!

   "Et tu seras aimée de mes amants, courtisée par mes courtisans. Tu seras la reine des hommes aux yeux verts dont j'ai serré aussi la gorge dans mes caresses nocturnes; de ceux-là qui aiment la mer, la mer immense, tumultueuse et verte, l'eau informe et multiforme, le lieu où ils ne sont pas, la femme qu'ils ne connaissent pas, les fleurs sinistres qui ressemblent aux encensoirs d'une religion inconnue, les parfums qui troublent la volonté, et les animaux sauvages et voluptueux qui sont les emblèmes de leur folie."

   Et c'est pour cela, maudite chère enfant gâtée, que je suis maintenant couché à tes pieds, cherchant dans toute ta personne le reflet de la redoutable Divinité, de la fatidique marraine, de la nourrice empoisonneuse de tous les lunatiques.

 

 

 

 

 

 

Charles BAUDELAIRE

Le Spleen de Paris

—Repris en 1864 sous le titre Petits poèmes en prose—

(Initialement publié sans titre dans la revue Le Boulevard en 1963)

 

 

 


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7 février 2014 5 07 /02 /février /2014 09:50

 

 

 

 

 

 

La nymphe Salmacis

 

 

 

On voit dans le musée antique,

Sur un lit de marbre sculpté,

Une statue énigmatique

D’une inquiétante beauté.

Est-ce un jeune homme ? est-ce une femme,

Une déesse, ou bien un dieu ?

L’amour, ayant peur d’être infâme,

Hésite et suspend son aveu.

Dans sa pose malicieuse,

Elle s’étend, le dos tourné

Devant la foule curieuse,

Sur son coussin capitonné.

Pour faire sa beauté maudite,

Chaque sexe apporta son don.

Tout homme dit : « C’est Aphrodite ! »

Toute femme : « C’est Cupidon ! »

Sexe douteux, grâce certaine,

On dirait ce corps indécis

Fondu, dans l’eau de la fontaine,

Sous les baisers de Salmacis.

 

 

 

 

Théophile Gautier 

Émaux et Camées

                                                    

 

_La_nymphe_Salmacis.jpg

 

 

 

 

 

 

 

 

La nymphe Salmacis

 

François Joseph Bosio (1768-1845)

Sculpture de 1826 - Musée du Louvre, Paris.

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31 janvier 2014 5 31 /01 /janvier /2014 05:52

 

 

 

 

 

"Quand on aime, l'amour est trop grand pour pouvoir être contenu tout entier en nous; il irradie vers la personne aimée, rencontre en elle une surface qui l'arrête, le force à revenir vers son point de départ et c'est ce choc en retour de notre propre tendresse que nous appelons les sentiments de l'autre et qui nous charme plus qu'à l'aller, parce que nous ne connaissons pas qu'elle vient de nous."

 

Marcel Proust

A l'ombre des jeunes filles en fleurs

 

 

Picasso-femme-a-la-chemise--1905.jpeg
Picasso
Femme à la chemise, 1905

 

 

(...)

"Tout le problème avec Odette, c'est qu'elle n'a jamais justifié sa décision de tout plaquer, là, un beau jour de juillet voici trois ans exactement. Du coup, les rumeurs les plus fantaisistes ont circulé à son sujet: déception amoureuse, maladie contractée au cours de sa brève carrière, crise existentielle à l'approche de la trentaine? Quand je fais parfois allusion à son amitié, je me souviens que, sans être d'une beauté flamboyante, elle dégageait cette sensualité si particulière - à la commissure des lèvres, dans les plis de ses yeux où perçait une gaieté discrète ainsi qu'une absence de crainte et d'innocence - semblable à la houle charriant ces mouvements de l'âme propres aux femmes hardies et déterminées. Avec pourtant ce mur infranchissable qu'elle avait dressé entre sa vie privée dont peu m'était connu et celle, publique: banale, mesurée, conventionnelle, chez une jeune femme de son âge. Sa silhouette se détachait toujours dans les rues de Brive-la-Gaillarde, solitaire, drapée dans une cape noire dont les mauvaises langues disaient qu'elle n'abritait pas - outre ses bijoux et ses escarpins made in Italy - de parure excessive... 

Je ne lui ai connu aucune liaison amoureuse officielle, mais toutes et tous semblent l'avoir regrettée - jeunes et moins jeunes - au pays où jamais elle ne refit son apparition. Voici une quinzaine de jours, j'ai reçu - pour la troisième fois en trois ans - de ses nouvelles. Elle vit aujourd'hui quelque part dans les Cévennes, à proximité d'un monastère, avec ses chats et ses livres, cet autre penchant qu'elle a toujours éprouvé. Epanouie dirais-je, libre et secrète comme autrefois. Je ne t'en dirai pas davantage, mon cher Fred, sinon qu'elle a conservé dans un écrin ce ruban rouge qu'elle portait autour du cou et que je lui avais offert pour son vingt-cinquième anniversaire. Me reviennent aussi en mémoire ses derniers mots, tracés à la hâte en bas de page de sa dernière lettre, signés Marcel Proust: Quand d'un passé ancien rien ne subsiste, après la mort des êtres, après la destruction des choses, seules, plus frêles mais plus vivaces, plus immatérielles, plus persistantes, plus fidèles, l'odeur et la saveur restent encore longtemps, comme des âmes, à se rappeler, à attendre, à espérer, sur la ruine de tout le reste, à porter sans fléchir, sur leur gouttelette presque impalpable, l'édifice immense du souvenir... "

 

 

Marcel Proust

Du côté de chez Swann 

 

 

 

 

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