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18 juin 2010 5 18 /06 /juin /2010 14:24

 

 

matthieu seuil ultime

 

Illustration : Seuil ultime. Georges Mathieu

 


Georges Mathieu est né en 1921 à Boulogne-sur-mer. Il n’a fait aucune école d’art avant de se lancer dans la peinture, dans la plus grande solitude. Très vite, il rencontre dans le Paris d’après-guerre, Wols, Atlan, Hartung et s’affirme comme l’acteur et l’instigateur de l’abstraction lyrique. Peintre et penseur, homme de grande culture, Mathieu a la conviction très tôt de faire un art total qui fait table rase de la beauté platonicienne. Il opère une révolution sémantique : le signe précède le sens, l’image plastique précède l’idée.

 


 

 Je me perpétuerais

 

 

Je me perpétuerais et toi, tel un goéland, tu me couperais de ton aile... Comme je t'appartiens!

Tu as le sens des mouvements qui me grisent, et la diction d'un fanal. Mes flots se teintent.

Tu renverses l'azur en moi. Tu jalonnes mon ventre d'ifs tout allumés. C'est la fête. Je deviens poreuse. Tu m'échevelles. je t'accompagne. Nous descendons au ralenti un escalier de pourpre, je me voile dans l'écume, le vent se lève, tu t'effaces devant les portes, où suis-je?

 

Mais tu ne réponds pas, tu m'inspires des flambeaux de passage, tu déplies soigneusement la volupté, tu détournes ma soif, tu me prolonges, tu me chrysalides et je suis de nouveau élue. Alors je danse, je danse, je danse ! comme une flamme debout sur la mer ! les paupières fermées. Ta patience fait mon bonheur. Je suis nue, j'en ai conscience et je te remercie parce que la fin de la folie est imprévisible. Tu échafaudes des merveilles. Tu me crucifies à toi. Le plaisir est doucement douloureux. Je suis bien.

 

Laisse-moi te dire : j'ai besoin de me sentir voyagée comme une femme. Depuis des jours et des nuits, tu me révèles. Depuis des nuits et des jours, je me préparais à la noce parfaite. Je suis libre avec ton corps. Je t'aime au fil de mes ongles, je te dessine. Le coeur te lave. Je t'endimanche. Je te filtre dans mes lèvres. Tu te ramasses entre mes membres. Je m'évase. Je te déchaîne.

 

In Les Epiphanies

 


 



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18 juin 2010 5 18 /06 /juin /2010 08:32

 

Une très honorable et éminemment distinguée correspondante nous transmet ce poème, nous avertissant que l'origine attribuée à B.DIOP reste incertaine. Il n'importe l'origine, le poème est beau. Le voici :

 

IMPOSSIBILITE


Je voudrais vous dire des choses si tendres,
Vous murmurer des mots si doux,
Que seules les fleurs mortes peuvent entendre
Car c'est tout ce que j'ai de vous.
 
Je voudrais vous confier mon rêve de folie
Mon beau rêve si insensé,
Hanté par le spectre de la mélancolie
Où viennent sombrer mes pensées.
 
Je voudrais vous dire pourquoi mon âme pleure
Quand tout aime et refleurit,
Pourquoi elle gémit à la fuite de l'heure
Qui part sans apporter l'oubli.
 
Je voudrais vous dire comment je vous adore.
Hélas je ne le pourrais pas,
Et c'est en mon rêve qui s'envole à l'aurore
Que je dois le dire tout bas.
 
B. Diop

 

Le titre, Impossibilité, nous amène à Cioran :

" L’obsession de l’ailleurs c’est l’impossibilité de l’instant ; et cette impossibilité est la nostalgie même."

Oserons-nous suggérer que Cioran tourne les yeux vers la nostalgie là où il aurait dû dire la tragédie. La tragédie n'est-elle pas justement  l'instant présent, l'impossibilité d'aller devant de même que celle d'aller en arrière. 


C'est terrible mais fabuleux que cette position d'archi-domination de l'absurde et de volonté infinie de saisir l'arme absolue : l'amour (pour le sens).

En aimant, l'ailleurs se crée au sein même de l'instant, c'est le dédoublement des réalités qui aboutit au renversement du monde.

Renversement du monde, vaste carnaval faisant triompher l'amour, sentiment absolu, sentiment déchaîné...

 



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16 juin 2010 3 16 /06 /juin /2010 23:45

PicassoRimbaud.jpg

Illustration : portrait d’Arthur Rimbaud. Lithographie de Picasso – 13 décembre 1960 -


Elle 

Sans Elle, la mélancolie

 

 

Une folie sans fièvre, un délire serein, un mal de vivre, une langueur, une tristesse ? La mélancolie est un beau mot qui évoque le « à quoi bon ? » sans révolte, le dépit sans colère, le repli sur soi qui n’en veut à personne.

 

C’est la routine de l’existence, ou bien le mal de vivre auquel on s’habitue – on peut trouver bonne une potion infecte à force d’en boire chaque soir - , ou bien une blessurette que n’accompagne aucun sentiment d’injustice.

 

La mélancolie, le désastre, la médiocrité aussi s’attrapent comme une mauvaise fièvre.

 

Avec Elle, la poésie

 

Elle vous  passe le goût ardent du bonheur, si étranger pour ceux qui vivraient un temps ravagé. Il y a quelque chose de contagieux dans le bonheur qu’elle cultive et dont on se nourrit à la becquée.


 

Rimbaud écrit :

 

A*** Elle

 

Rêvé pour l’hiver

 

L’hiver, nous irons dans un petit wagon rose

Avec des coussins blancs.

Nous serons bien. Un nid de baisers fous repose

Dans chaque coin moelleux.

 

En wagon, le 7 octobre 1870

 

Note 1 : Le poème a une dédicace A***Elle, avec des étoiles pour masquer le nom de la belle élue. Les étoiles sont apparues plus tard, dans "Un cœur sous la soutane". Étrange début pour un rêve que de commencer par un verbe au futur: "L'hiver nous irons". Ici, la réalité est embellie : le wagon est de couleur rose et les sièges en bois qu’on imagine inconfortables sont recouverts de coussins bleus : "nous serons bien".

 

                            *             *               *

 

ernest-pignon-pignon_ernest_rimbaud-434-450-450.jpg 

Illustration : Rimbaud par Ernest Pignon-Ernest (voir note 2)

 

Allez ! Allez ! (Re)lisons vite pour ensoleiller la journée le premier poème des Cahiers de Douai. Le tout premier. Première soirée. C’est le titre. Rimbaud a 16 ans !

 

Première soirée

 

- Elle était fort déshabillée

Et de grands arbres indiscrets

Aux vitres jetaient leur feuillée

Malinement, tout près, tout près.

 

Assise sur ma grande chaise,

Mi-nue, elle joignait les mains.

Sur les planchers frissonnaient d'aise

Ses petits pieds si fins, si fins.

 

- Je regardai, couleurs de cire,

Un petit rayon buissonnier

Papillonner dans son sourire

Et sur son sein, - mouche au rosier.

 

- Je baisai ses fines chevilles.

Elle eut un doux rire brutal

Qui s'égrenait en claires trilles,

Un joli rire de cristal.

 

Les petits pieds sous la chemise

Se sauvèrent: "Veux-tu finir!"

- La première audace permise,

Le rire feignait de punir!

 

- Pauvrets palpitants sous ma lèvre,

Je baisai doucement ses yeux:

- Elle jeta sa tête mièvre

En arrière: "Oh! C'est encor mieux!...

 

Monsieur, j'ai deux mots à te dire..."

-Je lui jetai le reste au sein

Dans un baiser, qui la fit rire

D'un bon rire qui voulait bien...

 

- Elle était fort déshabillée

Et de grands arbres indiscrets

Aux vitres jetaient leur feuillée

Malinement, tout près, tout près.

 

Note 1 : Que d'enthousiasme que l'éveil sentimental d'un adolescent nommé Rimbaud ! Ce sont là quelques vers de ses premiers poèmes, écrits avant sa troisième fugue de Douai, à partir de laquelle il connaîtra des mutations profondes. N'a-t-il pas demandé à Monsieur Demeny (dans une lettre du 10 juin 1871), de brûler tous ces vers « qu'il fut assez sot d'écrire ». Demeny a bien fait de ne pas les brûler, ce qui nous permet aujourd'hui d'apprécier son incroyable précocité… poétique.

Note 2 : Immense artiste contemporain. Né en 1942 à Nice, Ernest Pignon-Ernest a fait ses débuts en réalisant des dessins d'architecture. Depuis 1966, il expose chaque année ses œuvres nouvelles dans le cadre d'expositions personnelles ou dans les grands musées européens. Principaux temps forts : 1978, Rimbaud, Paris Charleville. 1980, "accrochage" à Beaubourg. 1984, "Les Arbrorigènes". 1988, début des "interventions" à Naples. 1997, "Tête à tête", Antonin Artaud, Paris. Ernest Pignon-Ernest a en outre dessiné le rideau de scène de l'Opéra de Monaco.

 

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15 juin 2010 2 15 /06 /juin /2010 23:17

Bestiaire1.jpg

Bestiaire

 

LE LEZARD        

 

Lézard des rochers,

Lézard des murailles,

Lézard des semailles,

Lézard des clochers.

Tu tires la langue,

Tu clignes des yeux,

Tu remues la queue,

Tu roules, tu tangues.

Lézard bleu diamant

Violet reine-claude,

Et vert d'émeraude,

Lézard d'agrément!


 

Le cinquième des...

... quatre sans cou

 

Quand ils mangeaient, c'était sanglant,

 

Et tous quatre chantant et sanglotant,

Quand ils aimaient, c'était du sang.

 

Quand ils couraient, c'était du vent,

Quand ils pleuraient, c'était vivant,

Quand ils dormaient, c'était sans regret.

 

Quand ils travaillaient, c'était méchant,

Quand ils rodaient, c'était effrayant,

Quand ils jouaient, c'était différent,

Quand ils jouaient, c'était comme tout le monde,

Comme vous et moi, vous et nous et tous les autres,

Quand ils jouaient, c'était étonnant.

 

Mais quand ils parlaient, c'était d'amour.


 

« Les hiboux »

 

Ce sont les mères des hiboux

Qui désiraient chercher les poux

De leurs enfants, leurs petits choux,

En les tenant sur les genoux.

Leurs yeux d'or valent des bijoux

Leur bec est dur comme cailloux,

Ils sont doux comme des joujoux,

Mais aux hiboux point de genoux !

Votre histoire se passait où ?

Chez les Zoulous ? Les Andalous ?

Ou dans la cabane bambou ?

A Moscou ? Ou à Tombouctou ?

En Anjou ou dans le Poitou ?

Au Pérou ou chez les Mandchous ?

Hou ! Hou !

Pas du tout, c'était chez les fous.

 


 

  

Le Blaireau

 

Pour faire ma barbe

Je veux un blaireau,

Graine de rhubarbe,

Graine de poireau.

 

Par mes poils de barbe !

S'écrie le blaireau,

Graine de rhubarbe,

Graine de poireau,

 

Tu feras ta barbe

Avec un poireau,

Graine de rhubarbe,

T'auras pas ma peau.

 

 


Robert Desnos est un poète français, né en 1900 à Paris. Il est mort du typhus le 8 juin 1945 au Camp de concentration de Theresienstadt, en Tchécoslovaquie à peine libérée du joug de l'Allemagne nazie. Il fut un membre actif de la résistance.

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15 juin 2010 2 15 /06 /juin /2010 14:40

phi.jpg

Illustration : un phi minuscule

Philo-sophia : l’amour de la sagesse

 

 

Primum vivere, deinde philosophari, d'abord vivre, ensuite philosopher dit l'adage. Certes, tous les hommes ont bien évidemment besoin de nourriture, mais il y a également autre chose dont nous avons tous besoin: c'est de savoir qui nous sommes et pourquoi nous vivons. Un grand étonnement inaugure la réflexion philosophique, il est consubstantiel à l'homme : Qui suis-je ? Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? Faut-il trouver le sens de la vie ou un sens à sa vie ? La philosophie naît là où des hommes sont en route, s'éveillent, s'étonnent, sont bouleversés. L'homme qui se demande « à quoi bon ? » et qui s'interroge n'est déjà plus un animal ou un esclave : il devient son propre sculpteur en veillant à s'imprimer forme vraie, belle et humaine.

Faire de la philosophie, c'est ainsi tenter de trouver des explications, c'est s'engager dans une démarche de réflexion afin de comprendre et de savoir le pourquoi des choses, pour être en mesure d'apprécier le sens global de la vie humaine. C'est réfléchir et penser à ce que nous sommes afin de trouver les valeurs ou les attitudes qui nous paraissent les plus sensées. La philosophie apparaît comme un instrument apte à favoriser la rencontre de l'homme avec lui-même. Car de tous les rendez-vous qui jalonnent la vie d'un homme, celui qu'il se donne à lui-même n'est pas le moins enthousiasmant ni le moins exigeant.

Ici, Platon (Phédon) nous met en garde devant les dangers du relativisme et les séductions éphémères du matérialisme. Là, Epicure (le Manuel) éclaire la voie à suivre pour nous cuirasser contre le malheur et la sinistrose ambiante. Plus loin, Descartes et Kant incarnent la résistance critique devant les carcans des conventions et du « prêt-à-penser ». Et contre les tentations totalitaires et contre la barbarie, écoutons Hanna Arendt ou Karl Popper… On pourrait multiplier les exemples: l'essentiel reste que la philosophie est cet effort pour saisir le Vrai, le Beau, le Bien à travers un quotidien qui, loin de nous retenir prisonniers, nous permettra de nous éveiller et de faire émerger des valeurs fondatrices. Et c'est à la liberté de chaque apprenti-philosophe d'assumer le courage de ce rendez-vous avec lui-même.

 

Alors, bon courage pour jeudi matin !




I

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14 juin 2010 1 14 /06 /juin /2010 15:58

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L'Adieu

 

J'ai cueilli ce brin de bruyère

L'automne est morte souviens t'en

Nous ne nous verrons plus sur terre

Odeur du temps brin de bruyère

Et souviens-toi que je t'attends

 

Guillaume Apollinaire In Alcools (1913)

 

Note : cette bruyère, cette attente d'un être au-delà de la mort font-elles écho au célèbre poème de Hugo ? :

« Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,

Je partirai, vois-tu, je sais que tu m'attends,

(…)

Et quand j'arriverai, je mettrai sur ta tombe

Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur ».



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14 juin 2010 1 14 /06 /juin /2010 09:43

 

Chanson

Bonjour mon cœur, bonjour ma douce vie.

Bonjour mon œil, bonjour ma chère amie,

Hé ! bonjour ma toute belle,

Ma mignardise, bonjour,

Mes délices, mon amour,

Mon doux printemps, ma douce fleur nouvelle,

Mon doux plaisir, ma douce colombelle,

Mon passereau, ma gente tourterelle,

Bonjour, ma douce rebelle.

 

In le Second livre des Amours.

 


 

Maîtresse, embrasse-moi...

 

Maîtresse, embrasse-moi, baise-moi, serre-moi,

Haleine contre haleine, échauffe-moi la vie,

Mille et mille baisers donne-moi je te prie,

Amour veut tout sans nombre, amour n'a point de loi.

 

Baise et rebaise-moi ; belle bouche pourquoi

Te gardes-tu là-bas, quand tu seras blêmie,

A baiser (de Pluton ou la femme ou l'amie),

N'ayant plus ni couleur, ni rien semblable à toi ?

 

En vivant presse-moi de tes lèvres de roses,

Bégaie, en me baisant, à lèvres demi closes

Mille mots tronçonnés, mourant entre mes bras.

 

Je mourrai dans les tiens, puis, toi ressuscitée,

Je ressusciterai ; allons ainsi là-bas,

Le jour, tant soit-il court, vaut mieux que la nuitée.

 

In Sonnet pour Hélène (1578)

 

Note 1 : le « Prince des poètes », longtemps tombé dans l’oubli, revint en lumière au XIX ème grâce à Sainte-Beuve, Maupassant et Flaubert. Il inspira dès lors de nombreux compositeurs comme Debussy, Saint-Saens, Ravel, Poulenc et Milhaud.

Note 2 : dans le second poème, l'évocation du Carpe Diem d'Horace parait avec force.



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13 juin 2010 7 13 /06 /juin /2010 16:57

 

Le philosophe français Alain Finkielkraut a dénoncé dimanche le danger que représente à ses yeux "un mouvement islamo-gauchiste qui est ostensiblement indifférent à la mémoire de la Shoah". Invité à la 7e conférence sur l'enseignement de la Shoah, organisé par le mémorial de Yad Vashem à Jérusalem, M. Finkielkraut a déploré que l'enseignement de la Shoah, notamment dans les écoles, "soit si difficile en France". Selon lui, "la situation au Proche-Orient risque d'amplifier ce mouvement de rage contre la mémoire de la Shoah qui existe" dans le pays.

Dans une interview à l'AFP, le philosophe a désigné ce mouvement comme "l'union de gens issus de l'immigration et d'intellectuels progressistes, une sorte d'arc islamo-gauchiste qui m'inquiète". "Je crois que le moment où Auschwitz sera boycotté  comme un produit israélien peut arriver", a-t-il ajouté, en faisant allusion au mouvement international pro-palestinien qui appelle au boycottage économique et culturel d'Israël.

De son côté, François Zimeray, ambassadeur pour les droits de l'homme au ministère français des Affaires étrangères, également invité, a regretté que "la perception déformée de la Shoah par une partie du public en France amène à une négation d'Auschwitz". "Quand j'entends en France des gens comparer Gaza à un camp de concentration, c'est du révisionnisme contre lequel nous devons lutter", a-t-il estimé.

 



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12 juin 2010 6 12 /06 /juin /2010 00:37

1) Mon mari vient, prenez vite votre temps pour demander Lucile en mariage.
(Le Bourgeois Gentilhomme, Mme Jourdain).

>>> saisissez l’occasion

2) Et lorsque l’Amour touche un cœur, On n’a point de raison à dire (Psyché, Agénor).

>>> on n’a point d’argument à opposer

3) Ce serait trop à nous, que de nous informer
(Id., Aglaure).

>>> ce serait abuser

4) Vous ne m’en donnez pas le temps, et vous avez des soins là-dessus, qu’il est difficile de prévenir (Le Malade Imaginaire, Toinette).

>>> vous en êtes tant préoccupé ; devancer

5) Eh Monsieur, laissez là ce pauvre misérable, c’est conscience de le battre ;
(Le Festin, Sganarelle).

>>> c’est immoral

6) Assurément, et il se moque de croire l’emporter sur vous ; voilà, auprès de vous un beau petit morveux de Prince.
(Les Amants magnifiques, Clitidas).

 

>>> il est ridicule s’il croit ; comparé à vous



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11 juin 2010 5 11 /06 /juin /2010 14:17

prevert.jpg

Barbara

 

Rappelle-toi Barbara  

Il pleuvait sans cesse sur Brest ce jour-là  

Et tu marchais souriante  

Épanouie ravie ruisselante  

Sous la pluie  

Rappelle-toi Barbara  

Il pleuvait sans cesse sur Brest  

Et je t'ai croisée rue de Siam  

Tu souriais  

Et moi je souriais de même  

Rappelle-toi Barbara  

Toi que je ne connaissais pas  

Toi qui ne me connaissais pas  

Rappelle-toi  

Rappelle-toi quand même jour-là  

N'oublie pas  

Un homme sous un porche s'abritait  

Et il a crié ton nom  

Barbara  

Et tu as couru vers lui sous la pluie  

Ruisselante ravie épanouie  

Et tu t'es jetée dans ses bras  

Rappelle-toi cela Barbara  

Et ne m'en veux pas si je te tutoie  

Je dis tu à tous ceux que j'aime  

Même si je ne les ai vus qu'une seule fois  

Je dis tu à tous ceux qui s'aiment  

Même si je ne les connais pas  

Rappelle-toi Barbara  

N'oublie pas  

Cette pluie sage et heureuse  

Sur ton visage heureux  

Sur cette ville heureuse  

Cette pluie sur la mer  

Sur l'arsenal  

Sur le bateau d'Ouessant  

Oh Barbara  

Quelle connerie la guerre  

Qu'es-tu devenue maintenant  

Sous cette pluie de fer  

De feu d'acier de sang  

Et celui qui te serrait dans ses bras  

Amoureusement  

Est-il mort disparu ou bien encore vivant  

Oh Barbara  

Il pleut sans cesse sur Brest  

Comme il pleuvait avant  

Mais ce n'est plus pareil et tout est abîmé  

C'est une pluie de deuil terrible et désolée  

Ce n'est même plus l'orage  

De fer d'acier de sang  

Tout simplement des nuages  

Qui crèvent comme des chiens  

Des chiens qui disparaissent  

Au fil de l'eau sur Brest  

Et vont pourrir au loin  

Au loin très loin de Brest  

Dont il ne reste rien.

 

 

Jacques Prévert in Paroles. (1946)

 

Note : « Quelle connerie la guerre » ou comment elle triomphe, sous la pluie, de l’amour « Dont il ne reste rien ». « Rien ». 

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