Entrée en matière. CYRANO de BERGERAC. ACTE I - scène IV -
Le Vicomte, méprisant.
Poète ! ...
Cyrano
Oui, monsieur, poète ! Et tellement,
Qu’en ferraillant je vais -hop ! - à l' improvisade,
Vous composer une ballade.
Le Vicomte
Une ballade ?
Cyrano
Vous ne vous doutez pas de ce que c'est, je crois ?
Le Vicomte
Mais...
Cyrano, récitant comme une leçon.
La ballade, donc, se compose de trois
Couplets de huit vers...
Le Vicomte, piétinant.
Oh !
Cyrano, continuant.
Et d'un envoi de quatre...
Le Vicomte
Vous...
Cyrano
Je vais tout ensemble en faire une et me battre,
Et vous toucher, monsieur, au dernier vers.
Le Vicomte
Non !
Cyrano
Non ?
(déclamant)
" Ballade du duel qu'en l'hôtel bourguignon
Monsieur De Bergerac eut avec un bélître ! "
Le Vicomte
Qu’est-ce que c' est que ça, s' il vous plaît ?
Cyrano
C’est le titre.
Une histoire de titres.
Ce n’est pas rien d’aborder Baudelaire ! Le premier poème que nous avons publié à notre escient (L’Etranger) se termine par l’énigmatique «… Les merveilleux nuages ».
Plus tôt, nous avions signalé ici que F.Sagan avait repris un vers de Paul Eluard pour titrer son premier roman Bonjour tristesse. Quelques années plus tard, elle publia, en 1961, « Les merveilleux nuages » et ne cacha pas son inspirateur. Ce roman fut sans doute le premier à être salué par la critique unanime, qui la reconnut comme écrivain à part entière. Extrait :
« Elle se souvint brusquement de son voyage retour de New York. Partie à midi, elle était arrivée six heures plus tard à Paris, où il était minuit. Elle avait vu en une période d’une demi-heure le soleil éblouissant du matin se baisser, devenir rouge, disparaître tandis que les ombres du soir semblaient se lancer à l’assaut de l’appareil, défilaient en nuages bleus, mauves et enfin noirs sous les hublots et d’un coup elle était rentrée dans la nuit. Elle avait éprouvé un curieux désir alors, celui de se baigner dans cette mer de nuages, ce mélange d’air, d’eau et de vent qu’elle imaginait sur sa peau, léger et doux, enveloppant comme certains souvenirs d’enfance. Il y avait quelque chose d’incroyable dans ces paysages du ciel, quelque chose qui réduisait votre vie à un rêve idiot « empli de bruit et de fureur », rêve accompli aux dépens de cette sérénité poétique qui comblait les yeux et aurait dû être la vraie vie. »
Jorge Semprun a publié au printemps 2010 une sélection de ses articles et interventions diverses relative à l’Europe d’hier et d’aujourd’hui sous le titre Une tombe au creux des nuages. La première chose qu’il disait, lors de ses nombreux passages sur les ondes, concernait l’emprunt du titre au poème de Paul Celan, le très célèbre Todesfuge, La fugue de mort, que l’on peut relire ici
Michel Houellebecq, unanimement récipiendaire du Goncourt 2010 depuis début septembre (hihi !) pour La Carte et le Territoire ne s’empresse pas de citer sa source, savoir Alfred Korzybski (1879-1950). D’origine polonaise, Korzybski est un touche-à-tout de génie. Pour faire court, il est l’auteur de La Carte est plus belle que le territoire. En savoir plus sur Korzybski : http://fr.wikipedia.org/wiki/Alfred_Korzybski