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26 septembre 2011 1 26 /09 /septembre /2011 06:58

 

Nous poursuivons la publication d'extraits choisis arbitrairement

dans le Journal de Jules RENARD.

 

 

25 septembre.

 

 

Cet homme sinistre travaille tout le temps et croit qu'il fait quelque chose.

 

 

Un préjugé, c'est une vérité qu'on affirme trop. Il y a des vérités partout, mais il ne faut pas trop y croire, ni surtout y tenir.

 

 

Guitry, au fond, est un réactionnaire. Il aime les marquis de Bourget, ces beaux pantins qui peuvent avoir raison pendant cinq actes sans dire un mot de vrai.

 

 

Il faut se prêter de bonne foi à toutes les expériences. Il faut admirer une cérémonie religieuse si elle est belle, et non pas l'aimer ou la détester parce qu'elle est religieuse.

 

 

Nous avons fait notre éducation, formé notre goût, avec des livres dont la première page était déchirée. On n'en saurait dire ni le titre, ni l'auteur. C'est le vieux roman dépenaillé, qu'on a lu quarante fois en cachette, qui a eu le plus d'influence sur nous. 

 

 


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24 septembre 2011 6 24 /09 /septembre /2011 06:45

 

Nous poursuivons la publication d'extraits choisis arbitrairement

dans le Journal de Jules RENARD.

 

 

 

26 septembre.

 

 

Peindre les hommes ! Qu'est-ce que ça veut dire ? Il faudrait peindre le fond, mais on ne le voit pas. Nous n'observons que l'extérieur. Or, il n'est pas d'homme, même de grande valeur, qui, par ses paroles, ses attitudes et ses gestes, ne soit un peu ridicule. Nous ne retenons que ses ridicules. Impitoyable, l'art ne respecte aucune vertu, et, le résumé de toutes les expressions d'art, c'est que la vie semble surtout comique.

 

 

Une réflexion de paysan qui éclaire un homme jusqu'à l'âme, comme si son corps s'entrouvrait.

 

 

Je ne devrais écrire qu'après avoir entendu un air de musique. Des manchettes ne me mettraient pas en état d'inspiration.

 

 

Nos admirations dont nous ne sommes pas bien sûrs. Un simple « vraiment, vous aimez ça ? », du premier venu, nous trouble. Nous sentons que nous nous sommes peut-être trompés. De là à lâcher notre admiration, il n'y a qu'un jeu d'enfant.

 

 

Ah ! sauter sur le dos d'un lièvre et filer vers l'horizon.

 

 

-- Nous allions dans le monde avec Lavedan, dit Guiches, et nous récitions des monologues. Il y avait un orchestre composé de trois musiciens et d'un colonel, comme chef, qui battait ainsi la mesure : « Un, deux, trois, feu ! »

 

 

Mirbeau est un réaliste qui traite la vérité sans tact, avec des procédés tout romantiques.

 

 

Il ne faut point passer plus de temps à parler d'une pièce que l'auteur n'en a mis à l'écrire.

 

 

Je ne suis aimable avec les gens que si je suis bien sûr de leur être supérieur.

 

 

Tel qui veut se griser d'air pur, s'enivrer sur les hauteurs, n'arrive qu'à s'enrhumer.

 

 

 


 

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7 septembre 2011 3 07 /09 /septembre /2011 06:21

 

 

 

7 septembre 1889 


 


Mlle Blanche fait des vers. Elle trouve qu'il y a des gens qui les font mal. Elle recherche la délicatesse. Une personne l'engage à multiplier ses châles et ses fourrures. Elle lui répond, en vers, qu'une chose tient plus chaud qu'une fourrure : c'est l'amitié. Elle débite ainsi aux amis qui lui offrent à dîner un petit compliment sucré. Pour elle, la poésie, c'est cela. Une idée fine qui lui vient et qu'elle versifie la rend heureuse toute la journée. Elle ne se fait pas un autre idéal du poète et, par instants, elle pense qu'elle-même est cet idéal. Qui osera lui dire qu'elle se trompe ?

 

 

 Jules Renard.

 


 


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22 août 2011 1 22 /08 /août /2011 06:49

 

 Journal de l'année 1905. Extraits.

 

 

 

29 août. 


Le village dans son clair de lune comme des meubles sous une housse. 


L'escargot : vigneron avec sa hotte sur le dos, la tête traversée d'aiguilles à tricoter.

 

 

 

30 août. 


Je n'ai guère d'autres tristesses que celle que me donne un air de piano. 


 

31 août. 


Une mouche qui se frotte les mains. 


Quoique paralytique, je juge sévèrement la marche des autres. 


Tout ce que je peux faire, c'est de raccourcir mes défauts : un accès d'humeur, de rancune, de vanité, dure moins longtemps. 


Mais je crois que l'égoïsme a toujours la même longueur. 


 

 

 

à suivre...


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20 août 2011 6 20 /08 /août /2011 06:35

 

       Journal de l'année 1905. Extraits.

 

11 août. 


(…)

Et voilà que je fais le petit enfant. Je dis à Marinette : 


-- Tu as le petit enfant qu'il fallait à la satisfaction de tous tes instincts maternels, qui demande que d'abord on lui pardonne tout et qu'il ne faut pas qu'on gronde trop fort quand il ne travaille pas, et qui serait toujours heureux de ne jamais rien faire. 


Marinette m'a tout donné. Pourrais-je dire que, moi, je lui ai tout donné ? Il me semble bien que mon égoïsme reste intact. 


Quand je lui dis : « Sois franche », elle lit très bien dans mes yeux jusqu'où il faut aller. 


C'est le seul être que je sois sûr d'aimer, avec moi. Et, encore, moi... Je me fais faire souvent une grimace de dégoût. Oui, elle, je l'aime beaucoup, et jamais je ne la juge mal. 


Peut-être avait-elle peur de moi, et elle s'est dit : « Il n'y a qu'une manière de me sauver : c'est d'avoir en lui une confiance absolue. Je ne ferai jamais mal. Si cela m'arrive sans que je le sache, il me préviendra, et il me pardonnera. » 


Parfois, quand elle regarde ses enfants, elle semble si près d'eux qu'on dirait deux de ses branches. 


Par ses yeux on voit son coeur, un coeur rose. C'est du soleil. 


Y a-t-il, au fond de ses yeux, sur la rétine, un miroir, un petit coin que la tendresse ne voile pas, et où je ne me reflète pas en beau ? 


Ses bras nus ont frais. 


J'ai Marinette : je n'ai plus droit à rien. 


(…)

Je ne suis pas sûr qu'elle m'ait rendu meilleur, mais j'ai pris de bonnes apparences. 


A la pensée qu'elle pourrait, à cause de moi, tomber dans la misère, j'ai un serrement de coeur, mais je me dis trop vite : « Comme elle la supporterait bien ! Elle m'aimerait encore davantage. » 


- Je connais ma part, dit-elle, et je ne changerais avec aucune femme. 


 

 

 

 

à suivre...

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19 août 2011 5 19 /08 /août /2011 06:29

 

 

      Journal de l'année 1905. Extraits.

 

 

9 août.

Et on a dit à Marinette quelque chose d'un peu sentimental, et, tout à coup, on aperçoit, de l'autre côté de la haie, un paysan qui a entendu et qui a l'air gêné. 


Relu de vieilles lettres que j'ai écrites à Marinette. On ne change pas. Migraines, rages de travail, paresses, goût de vivre, et Marinette est toujours au centre. 


Ce qui m'étonne, c'est que je n'aie pas donné plus de détails. Il me semble qu'aujourd'hui l'oeil capterait tout. J'ai un meilleur appareil. Mais on s'aperçoit qu'on a tout de même vécu, et qu'il est bien naturel que la vie passe et même finisse par finir. 


Un travail de tuteur, de rameur de pois. On soutient la vie des autres : on ne vit pas. 


(…) 


Une feuille vivante arrachée, par une vague de vent, à l'arbre où elle s'accrochait comme à un mât. 


 

 à suivre...

 

 

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17 août 2011 3 17 /08 /août /2011 06:21

 

 

 

Jules Renard (1864-1910)  j.renard.jpg

Membre de l'Académie Goncourt, auteur de romans (Ragotte), de nouvelles (Histoires naturelles) et de pièces de théâtre (Poil de Carotte, Le Pain de ménage), est particulièrement connu pour son « Journal », reflet de la vie littéraire et sociale de son époque.

 

 


Journal de l'année 1905. Extraits.

* * *

 

7 août. 


Connaissez-vous un âne à vendre ? 


-- Moi ! dit un pauvre homme en pleine détresse. 


Et on l'aurait eu pour pas cher. 


* * *

L'égalité, c'est de l'envie. Oui, mais nous la supprimerons en supprimant nos raisons d'orgueil. 


* * *

La vitalité du chat qui a l'air si paresseux ! Ses oreilles et ses yeux travaillent toujours. Il a toujours en lui des bonds préparés et, sous lui, des griffes prêtes. 


* * *

Comme homme, le Christ est admirable. Comme Dieu, il laisse dire : « Quoi ! C'est tout ce qu'il a pu faire ? » 


 

 

9 août. 


Dans le sol léger la charrue glisse comme un petit bateau. 


* * *

Ils sont envieux, non pas du château, mais du voisin qui a réussi. 


 

 

10 août. 


La rêverie : le lierre de la pensée, qu'il étouffe. 


* * *

Promenade. Toujours cette nature émouvante et ce mystère de la création. 


Amitié de ces deux grands ormes isolés qui se ressemblent. 


(…)

 

à suivre...

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