Poésie, Poésie pour enfant, Poésie pour la jeunesse, Textes classiques et modernes, Mémoire de la Shoah,
Les yeux
Bleus ou noirs, tous aimés, tous beaux,
Des yeux sans nombre ont vu l'aurore.
Ils dorment au fond des tombeaux
Et le soleil se lève encore...
Les nuits plus douces que les jours
Ont enchanté des yeux sans nombre.
Les étoiles brillent toujours
Et les yeux se sont remplis d'ombre.
Oh ! Qu'ils aient perdu le regard
Non, non, cela n'est pas possible,
Ils se sont tournés quelque part
Vers ce qu'on nomme l'invisible.
Et comme les astres penchants
Nous quittent, mais au ciel demeurent
Les prunelles ont leur couchant
Mais il n'est pas vrai qu'elles meurent.
Bleus ou noirs, tous aimés, tous beaux,
Ouverts à quelque immense aurore
De l'autre côté des tombeaux
Les yeux qu'on ferme voient encore.
Sully Prudhomme
1839-1907
...Les yeux qu'on ferme voient encore.
...Bleus ou noirs, tous aimés, tous beaux,
Des yeux sans nombre ont vu l'aurore...
Toiles de Ferdinand Hodler, 1853-1918, peintre suisse.
toile du haut : Valentine sur son lit de mort, 1915
toile du bas : Jeune fille au pavot, vers 1889
Valentine Godé-Darel fut sa jeune maîtresse. Holder l’adorait et l'a peinte presque tout le long de sa vie.
Hodler, sur sa peinture, dit : « Tous les objets ont une tendance horizontale. La montagne s’arrondit par les siècles jusqu’à ce qu’elle soit plane comme la surface de l’eau. »