Nous poursuivons la publication d'extraits arbitrairement choisis
dans le Journal de Jules RENARD.
Ce jour de février 1905, nous découvrons un Jules Renard surprenant,
léger, badin...romantique même. Amoureux ?
11 février
Rêve. Alors, je me sentis tout à coup l'âme d'un collégien, et je vous dis :
- Nous avons une classe de mathématiques, ce soir. Elle m'ennuie. Je n'irai pas. Je resterai avec vous.
Oh ! votre joli sourire !
Je m'éveillai et fis de vains efforts pour maintenir votre image qui s'effaçait.
Vous avez acheté une boîte où il y avait des cerises, elles étaient jolies, mais la boîte ne faisait pas bien. Alors, vous avez mis sur les cerises le noeud de votre chapeau.
Ah ! Je ne me souviens plus. Si ! Attendez.
Et puis, je ne me rappelle pas. C'est le réveil. Vous mourez de mon réveil.
Oui, oui ! Ca ne veut rien dire, mais c'était du bonheur doux et fin comme la lumière.
Je donnerais bien des jours de réveil pour une nouvelle nuit de ce soleil-là.
Oh ! vous étiez plus jolie que vous n'êtes, plus jeune, plus fraîche, plus fine. Vous marchiez à peine, et votre voix n'avait pas de son. Seul je l'entendais.
Vous m'avez répondu par un sourire qui se fondait avec la gaieté des choses.
Je vous donne rendez-vous dans mon prochain rêve. Dites, vous viendrez ?
Je ne me souviens plus. Si vous croyez que c'est facile !
...à suivre, bien entendu...