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8 avril 2015 3 08 /04 /avril /2015 05:18

Déjà publié en 2010.

 

 

 

burqaloi_0.jpg

 

 

 

 

DES (mauvais) GENIES, ELFES ET JINNS.

 

 

Excusez-moi, Monsieur, je viens tout droit d'Ispahan, et me voici tout fraîchement débarqué à Paris, la ville lumière qui semble aujourd'hui bien obscure. Peut-être pourriez-vous m'éclairer ?

 

- Mais avec plaisir, cher Monsieur.

 

- Il s'agit du voile intégral. J'ai cru comprendre que les Parisiens, et les Français dans leur ensemble, n'en voulaient pas.

 

- Voilà qui n'est pas faux.

 

- Ce voile cacherait le visage des femmes...

 

- Entre autres, oui.

 

- Il les gênerait dans leur vie de tous les jours...

 

- Leurs nuits ne nous concernent pas.

 

- Les empêcherait de conduire...

 

- Avec nos embarras de circulation...

 

- Et, ajoute-t-on, attenterait à leur dignité de femme.

 

- Il y contribue peu !

 

- Mais on dit, à Ispahan, que votre Assemblée nationale, n'a pas été unanime à voter la loi qui en interdit le port ?

 

 

- C'est vrai.

 

- S'y sont opposés, je suppose, les gens de religion, hostiles à tout changement...?

 

- Eh bien non, justement. Se sont abstenus les députés de gauche.

 

- Les députés de gauche ! Allons donc. Auriez-vous, en France, tout inversé ? Le centre est bien toujours au milieu, rassurez-moi ?

 

- Plus que jamais.

 

- Les Français auraient-ils alors changé de boussole, d'orientation ? Ou de vocabulaire ?

 

- Ils n'en ont pas changé, ils n'en ont plus, Monsieur.

 

- Mais ce doit être terrible, pour un peuple aussi cartésien !

 

- Oh, détrompez-vous, s'ils n'en ont plus, c'est qu'ils en ont trop !

 

- Cela vous dérangerait beaucoup de m'expliquer un peu...Je comprends si mal...

 

- Eh bien notre France, voyez-vous, n'a plus le droit de parler de son identité...

 

- Mais enfin qui donc l'en empêche ? Vous serait-il échu un tyran ?

 

- Si ça n'était qu'un tyran, Monsieur ! Nos ancêtres nous ont appris à nous en débarrasser. Non ! vraiment pas de tyran. Il s'agit plutôt d'un fléau contre lequel les peuples sont impuissants.

 

- Même le peuple français ?

 

- Lui plus qu'un autre, croyez moi.

 

- Que voulez-vous dire ?

 

- Eh bien...Vous pensez vous trouver dans le pays des Droits de l'Homme, n'est-ce pas ?

 

- Certainement. Cela aussi a-t-il changé ?

 

- Cela seul a changé. Vous êtes à présent dans le pays des Devoirs de l'Homme.

 

- Ma foi, je comprenais mal, je ne comprends plus goutte !

 

- C'est pourtant simple: le monde entier vient chez nous pour nous rappeler ses droits, additionnés à ceux qu'il a été persuadé s'être acquis par le passé, ce qu'il appelle des dettes - et il nous somme tous les jours de nous acquitter de nos devoirs...

 

- Et vous consentez à leurs exigences ?

 

- Il s'agit bien de consentir ! Nous y sommes contraints de façon si insidieuse !

 

- Par qui ?

 

- Eh bien par des génies, des elfes, Monsieur. Des petits génies, des purs esprits, des jinns. Ici, là, partout. Nulle part.

 

- N'êtes-vous pas en train de vous approprier les cultures exotiques, cher Monsieur, dont la mienne ?

 

- Bien sûr que si. Vous avez l'illusion de vous trouver dans la France éternelle, une nation généreuse et accueillante, quelle erreur ! Vous êtes dans un pays que les jinns, les petits génies condamnent à renier tout ce qui fut sien, brillamment, par le passé, et à endurer en silence la lente, inexorable imprégnation de ses moeurs, de ses coutumes, par tout ce qui s'y dépose, porté par le vent des déserts, le sable du temps, et les cogitations funestes.

 

- Ce sont réellement d'invisibles esprits ?

 

- Même pas. On ne les aperçoit que trop. Leur orgueil les pousse à s'exhiber. Dans les airs d'abord, ils se suspendent à une sorte de toile, et apparaissent dans des lucarnes plus qu'étranges, où ils chantent, dansent, et, hélas, écrivent un charabia devenu notre langue. Dans des prothèses de villes, ensuite, appelées cités, où ils forment des apatries, des zones de mon-droit. Dans ce pays où, jadis, on aimait voir le beau et le grivois, comme au Moulin Rouge ou aux Folies Bergères, on entend braire les ânes et strip-teaser les belles âmes.

 

- Les belles âmes ?

 

- Oui, ces guides du peuple qui vous enduisent de Morale à tartiner à la moindre syllabe interdite, qui surveillent vos propos et ne châtient rien tant que le mot racisme.

 

Racisme ?

 

- Le racisme, oui, ce poison violent à l'état naturel, transformé par eux en tisane- mort -aux- rats pour nous faire oublier que ce que nous pensons vaut toujours que nous le disions, que la liberté sera toujours plus féconde que ses fruits, et que nous sommes ce que nous sommes pour le rester, afin de ne changer qu'en demeurant nous-mêmes.

 

- Ne pouvez-vous rien contre ces génies ?

 

- Quand l'intelligence se dilue dans sa caricature, quand les poings se cachent au bout des ailes et se font angéliques, quand on ne peut plus trouver noire l'action la plus vile, parce que c'est la discriminer, quand on ne peut plus s'élever contre qui a signé pour un siècle son contrat de victime, quand il faut s'interdire de manger des oranges cultivées sous l'étoile de David, et offrir le beurre, l'argent du beurre, et la burka de la crémière à ceux qui sont prêts à mourir pour un croissant, quand partout, l'absurde et la nuit donnent à ceux qui n'ont rien à dire le droit d'imposer silence à ceux qui tentent encore d'exister, alors, vous savez, mon bon Monsieur...

 

- Oui...J'imagine d'autant mieux qu'à Ispahan, vous savez, les choses ne sont pas  plus...

 

- Je le sais bien, mon pauvre Monsieur...C'est la mondialisation, comme ils disent. Et dire qu’il y a encore des gens qui sont curieux de ce qui se passe sur Mars...

 

- Oui...Comment disiez-vous avant d'être ...racistes ? Les cons comme la lune !

 

- Je vous laisse le dire, je ne le puis plus.

 

 

 

 

 

Ispahan.jpg 

La Grande Mosquée bleue place de l'Imam, Ispahan

 

 

 

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commentaires

J
Superbe !<br /> 5 ans après, un texte qui reste -évidemment- d'actualité. Policé et mordant. Avec cette note de découragement, que je partage ! Parce que notre pays est devenu celui où le délit de penser hors la Doxa est impitoyablement réprimé par un Police de la Bien-pensance adossée à une caste médiatique, à une presse écrite, audio et télé veules, vénales, serviles aux pouvoirs !
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