« Nous habitons l’absence » écrit le poète Houellebecq dès le premier poème. Ce vers de six syllabes, où son et sens fusionnent, condense notre époque : notre monde dévasté, nos semblants de vie et notre désertion de la transcendance.
Le vers aurait pu être écrit par Rimbaud, en écho à « La vraie vie est ailleurs ». Rimbaud condamne comme déraisonnable une aventure amoureuse vécue comme une fuite dans l'imaginaire et le simulacre :
"Quelle vie! La vraie vie est absente. Nous ne sommes pas au monde", dit la Vierge folle
(…) « Ses délicatesses mystérieuses m'avaient séduite. J'ai oublié tout mon devoir humain pour le suivre. Quelle vie ! La vraie vie est absente. Nous ne sommes pas au monde. Je vais où il va, il le faut. Et souvent il s'emporte contre moi, moi, la pauvre âme. »
Arthur Rimbaud, Vierge folle, l'Époux infernal, extrait.
Par la mort du plus pur
Par la mort du plus pur
Toute joie est invalidée
La poitrine est comme évidée,
Et l’œil en tout connaît l’obscur.
Il faut quelques secondes
Pour effacer un monde.
Disparue la croyance
Qui permet d’édifier
D’être et de sanctifier
Nous habitons l’absence.
Puis la vue disparaît
Des êtres les plus proches.
Michel Houellebecq
Configuration du dernier rivage
(Flammarion, 2013)
Michel Houellebecq, un corgy sur l'épaule...(*)
(*) Expatrié volontaire en Irlande, sitting near the fire place avec un corgy sur l'épaule, l'homme qui porte une chemise orange Deschiens sur une veste en tweed ne peut décidément pas être mauvais.