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14 juillet 2012 6 14 /07 /juillet /2012 05:05

15 juillet 1942 - 15 juillet 2012

 

 

Vent printanier

 

A Paris le 15 juillet 1942 a lieu une réunion technique pour la mise au point de la rafle de Paris, nom de code : "Vent printanier" (!). Y participent Dannecker, Darquier de Pellepoix, commissaire aux questions juives, Leguay, adjoint du chef de la police en zone occupée, François, directeur des camps de transit, Hennequin, directeur de la Police municipale de Paris, Tulard, directeur du fichier Juif de la préfecture de Paris, Garier, représentant le préfet du Département de la Seine, Schweblin, directeur de la Police anti-juive, Gallien, chef de cabinet de Darquier de Pellepoix, Guidot, officier d’Etat Major de la police municipale.

On avait choisi le Vélodrome d'Hiver pour rassembler les Juifs arrêtés avant de les déporter à l'Est. 9 000 hommes participeraient à l'opération, tous français. La gendarmerie française servirait d'escorte. Les policiers allemands n'interviendraient pas ouvertement dans la rafle qui, en principe, ne visait que des Juifs étrangers, ou apatrides, émigrés en France dans les années précédentes.

Au cours de cette veillée d'armes, au soir du 15 juillet 1942, on distribuait les ultimes consignes, on réquisitionnait les derniers autobus. Il s'agissait de transporter et d'enfermer près de 28 000 personnes, hommes, femmes et enfants. Une telle opération ne s'improvise pas. Des préparatifs d'une telle ampleur devaient nécessairement entraîner des fuites. Tous les fonctionnaires occupés à ventiler le fichier, tous les policiers mobilisés n'étaient pas nécessairement collaborateurs et antisémites. Ils avaient parfois des amis juifs qu'il leur était facile de prévenir, même d'une façon anonyme.

Aussi des rumeurs, des tracts circulaient-ils sous le manteau dans les quartiers populeux où les Juifs pauvres, depuis des siècles, ont l'habitude de s'amalgamer en arrivant à Paris. Une feuille clandestine, éditée en français et en yiddish, leur conseillait de se cacher, car une terrible épreuve les attendait. Une voix inconnue prévenait certains Israélites qui possédaient encore le téléphone (la loi le leur interdisait désormais) que la « nuit allait être chaude ».

La plupart de ceux qui avaient la chance de recevoir un tel avertissement comprenaient le danger qu'ils couraient, mais ils ne savaient guère comment y parer. Ils ne pouvaient fuir Paris sans faux papiers, car les leurs portaient le mot JUIF et la police surveillait toutes les gares. Ils ne possédaient presque plus d'argent. Passer en zone libre exigeait d'eux une filière qui n'était pas toujours sûre. Et puis il y avait les enfants qui paralysaient tout espoir de fuite.

 

Aussi certains, accablés ou fatalistes, ne voulurent pas croire au péril qui les menaçait et attendirent leur sort avec résignation. D'ailleurs ils conservaient la certitude que la France ne les abandonnerait pas.

D'autres, justement, avaient servi dans l'armée française et étaient médaillés de guerre. Ils entretenaient l'illusion d'être protégés par leurs médailles, comme on le leur avait laissé croire, et comme c'était le cas en zone libre. Ils ne tentèrent rien pour se mettre à l'abri alors qu'ils le pouvaient encore.

Pourtant quelques-uns plus lucides, plus prudents, se réfugièrent chez des amis ou des voisins, dans des cachettes que leur prévoyance avait préparées et purent ainsi échapper à ce que les Juifs ont appelé le jeudi noir. Beaucoup laissèrent leurs femmes et leurs enfants dans leur logement, car ils croyaient naïvement qu'on n'arrêterait que les hommes. Et déjà le soleil se couchait sur Paris.

 

 


Sur les douze mille victimes du Jeudi Noir, seule une vingtaine de rescapés reverra Paris libéré. Et pas un seul des 4 051 enfants.

 


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